
La qualité de vie de l'élève à l’École
Certification d’aptitude aux fonctions de Formateur Académique
Académie de Reims session 2017-2019
Mémoire professionnel
Discipline : Conseiller Principal d'Education
Titre : La qualité de vie de l'élève à l’École
Auteur : RACINE Laurent
Sommaire
1. La qualité de vie à l'école, un élément systémique du Climat Scolaire
2. La qualité de vie à l'école, un élément d'une action de formation en particulier
3. Lieux, espaces et temps scolaires
4. Rapports et liens entre les acteurs
5. Amélioration du climat scolaire
6. Amélioration des relations enseignants-élèves
Introduction :
Dans notre vie ordinaire, penser à la notion de qualité vient à mener une quête vers ce qui semblerait le choix d'excellence. Choisir la qualité, c'est choisir le meilleur. Parler de qualité, c'est parler d'aptitude ou de talent. Reconnaître la qualité, c'est classer les bonnes ou mauvaises manières.
Il nous revient alors, inéluctablement, à faire des classements ou des comparaisons, à chercher à chaque fois ce qui est bon, ce qui est meilleur pour nous et, dans un sentiment altruiste, pour nos semblables.
Associer à la vie à l’École, la notion de qualité prend une ampleur éducative et pédagogique. L’École, dans son ambitieux choix de faire de nos élèves des citoyens de demain instruits et réfléchis, prend en compte désormais que pour cela, il est nécessaire d'apporter une attention particulière à leur bien-être.
En 1994, l'Organisation Mondiale de la Santé a défini la qualité de vie comme «la perception qu'a un individu de sa place dans l'existence, dans le contexte de la culture et du système de valeurs dans lesquels il vit, en relation avec ses objectifs, ses attentes, ses normes et ses inquiétudes ».
Nous devons donc comprendre que cette définition s'ouvre sur des indicateurs objectifs et aussi sur des dimensions subjectives, et surtout que la santé n'est pas seulement l'absence de maladie.
Au démarrage de mes recherches, je m'étonnais de lire que les termes de bien-être ou de qualité de vie à l'école sont quasiment absents du Code de l'éducation et de la plupart des textes officiels. Avant 2012, des circulaires de rentrée y font référence mais essentiellement en associant ces termes à la santé physique des élèves.
C'est en 2017, que la circulaire de rentrée n°2017-045 fait une place à « un cadre de vie apaisé et respectueux qui met en confiance les élèves et les personnels ». La notion de bien-être est citée avec comme appui l'amélioration du climat scolaire.
Conseiller Principal d’Éducation depuis plusieurs années, cette idée, l'amélioration du climat scolaire, est une conception invariable de mon travail au quotidien. Faire en sorte que l'élève vienne à l’École, qu'il s'y sente bien, qu'il ait des conditions favorables d'apprentissage sont mes préoccupations majeures, avec une inquiétude prégnante de faire en sorte que l'élève fréquente assidûment l’École.
Ayant rejoint depuis trois ans, le Groupe Académique du Climat Scolaire, GACS, ma perception de cette notion de qualité de vie s'est améliorée, voire enrichie. J'ai pu en collaborant aux travaux du groupe mettre plus clairement des mots sur les maux de certains élèves, voire certains collègues. J'axe effectivement mon travail sur les contextes de vie des élèves mais je n'oublie pas que les conditions de vie et de travail des adultes au sein des établissements scolaires impactent de manière subjective les trajectoires des élèves. Les formations du GACS s'adressent à des adultes, enseignants et non -enseignants. Il est donc important de réfléchir à des temps de formation où l'adulte peut entendre qu'il y a une évolution des enjeux éducatifs et pédagogiques. La formation à venir se doit de considérer les élèves comme des acteurs de leur développement et de les aider à développer leurs compétences cognitives et sociales, tout en favorisant leur bien-être.
Fort de ces principes, à travers ce mémoire, j'aspire à répondre à la problématique qui suit :
Dans quelles mesures les éléments liés au facteur de la qualité de vie à l’École peuvent-ils être intégrés lors de l'élaboration, de la mise en œuvre et du suivi de module de formation ?
Mon travail est le fruit de diverses recherches et lectures, de multiples expériences de formation mais aussi celui de mon vécu personnel et de la richesse des rencontres professionnelles qui ont jalonné ma vie active.
Pour démarrer ma réflexion, il me semble nécessaire de dresser les contextes qui m'ont conduit à choisir ce sujet. Ensuite je décrirai les différents facteurs intervenants directement ou indirectement sur la qualité de vie des élèves à L’École. Enfin, je proposerai des pistes mettant en avant la formation comme vecteur d'évolution des pratiques professionnelles en proposant des outils à disposition.
PARTIE I
Le contexte de formation
Deux éléments ont donné naissance à ce travail de recherche. D'une part, je vais présenter la méthode "climat scolaire" appréhendée lors de ma participation au GACS. D'autre part, je vais décrire une action de formation menée dans un établissement scolaire où le concept de qualité de vie m'est apparu comme dégradé.
1. La qualité de vie à l'école, un élément systémique du Climat Scolaire
Le climat scolaire reflète le jugement que peuvent avoir les élèves, les éducateurs, les parents d’élèves de leur expérience de la vie et du travail au sein de l’école. Le concept de climat scolaire (appelé parfois « atmosphère », « tonalité », « cadre », « milieu ») repose sur une expérience subjective de la vie scolaire qui prend en compte l’école en tant que groupe large et les différents groupes sociaux au sein de l’école[1]. Cette notion inclut nécessairement tous les membres de la communauté scolaire.
Le climat scolaire renvoie à la qualité et au style de vie à l’école. Il reflète :
- des normes,
- des pratiques d’enseignement et d’apprentissage,
- des pratiques de gouvernance,
- des valeurs,
- la qualité du bâti,
- les relations interpersonnelles,
- la structure organisationnelle inclut dans la vie de l’école.
Les recherches universitaires sur ce concept datent du début du siècle et se sont accélérées au début des années 50. C’est une préoccupation majeure de l’Organisation de Coopération et de Développement Economiques. En 2012, la Délégation Ministérielle de
Prévention de Lutte contre les Violences en Milieu Scolaire a été créée. L’un de ses axes prioritaires de travail est l’amélioration du climat scolaire. La loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République en juillet 2013 place le climat scolaire comme un enjeu majeur. Son amélioration revêt une importance majeure pour refonder une école sereine et citoyenne. La vie à l’école est renouvelée avec plus de prévention (au niveau des violences physiques, psychologiques et morales), de sérénité (dans les apprentissages) et de bienveillance (pour les élèves et les acteurs du système éducatif). Pour que la qualité du climat scolaire s’améliore, il faut implanter des pratiques dans le quotidien.
Comment agir sur le climat scolaire d’un établissement ? La démarche nationale climat scolaire définit une stratégie :
- Agir de manière systémique ;
- Agir sur l’ensemble de l’organisation de l’établissement ;
- Agir sur l’ensemble des acteurs ;
- Combiner des actions portant sur différents facteurs.
Les facteurs[2] identifiés sont au nombre de sept et ils sont interdépendants[3].
- La dynamique d’équipe : Elle permet la cohérence et la constance des actions mises en place, et elle repose sur une culture et un projet commun. Cette stratégie d’équipe s’appuie sur la mobilisation de tous. La mutualisation des pratiques pluriprofessionnelles est centrale ainsi que la parole des acteurs et le bien être des personnels.
- La justice scolaire : Elle veille à ce que les élèves s’approprient les règles communes, se sentent protégés par elles et par la manière dont elles sont appliquées. Ce facteur prend en compte le sentiment de justice et d’injustice. Il traite du cadre et des règles, des mesures restauratives mais aussi des modalités d’évaluation.
- La pédagogie et la coopération : Ce facteur interroge sur comment les enseignements permettent aux élèves de développer leurs connaissances et leurs compétences, et d’orienter leur motivation vers les activités mises en place. Les stratégies pédagogiques pour un climat serein s’appuient sur la coopération entre élèves, la motivation, l’engagement, la parole de l’élève, les élèves acteurs.
- La prévention des violences et du harcèlement : Une véritable politique de prévention passe par une attitude pro-active sur le climat scolaire comprenant un volet de prévention des violences. Un plan de prévention des violences à l’école prend en compte : le harcèlement, la lutte contre toute forme de discrimination, la gestion de crise dans la classe et dans l’école et l’anticipation des conflits.
- La coéducation : Elle doit permettre aux familles, même lorsqu’elles sont éloignées de l’école, d’être entendues et respectées, pour pouvoir s’emparer avec elles, également, des questions éducatives partagées. Pour sa réussite on met l’accent sur l’attention portée à l’accueil, à la communication et à la parole des parents.
- Les pratiques partenariales : Elles s’appuient sur l’ensemble de la communauté
éducative, les collectivités territoriales et les associations. Elles s’appuient sur un lien fonctionnel clair à partir de projets d’actions évalués fondés par exemple sur des chartes.
- La qualité de vie dans l’école : Elle engage une réflexion sur les espaces scolaires, sur les relations interpersonnelles, sur les moyens offerts aux élèves pour s’exprimer… La qualité des temps, des espaces, la convivialité et le bien-être sont au centre de ce facteur.
Les effets et les résultats visés et démontrés par la recherche pour les établissements scolaires qui entrent dans la démarche climat scolaire sont multiples. L’amélioration des résultats scolaires, du bien être des élèves et des adultes, la diminution notable du harcèlement et des problèmes de discipline ont ou être observés. Les inégalités scolaires, l’absentéisme et le décrochage scolaire sont aussi en baisse. Les équipes sont plus stables.
2. La qualité de vie à l'école, un élément d'une action de formation en particulier
En avril 2018, il m'a été proposé de rejoindre une formation « Climat Scolaire » qui devait être assurée dans un établissement du département de l'Aube. La première et principale difficulté rencontrée était.la demande ait été faite seulement dix jours avant la date de la formation. Je devais en fait, remplacer une collègue CPE qui ne pouvait plus y participer.
Deuxième contrainte, des tensions importantes existaient parmi les enseignants et surtout entre une partie des enseignants et l'équipe de direction. Le tableau dressé par les intervenants était assez clair, la formation pouvait s'annoncer compliquée.
Au vu de ces éléments, j'accepte néanmoins d'y participer. L'hésitation résultait pour moi d'un manque de temps de préparation. L'équipe d'intervenants était bien constituée et composée d'experts dans le domaine de la formation, qui ont su me mettre en confiance et me donner les éléments nécessaires.
Un autre composant à cette formation m'a été demandé : la création d'une illustration ou d'une activité pour aborder un aspect du Climat scolaire, la qualité de vie de l'élève.
En effet, pour chaque facteur, un outil de formation est mis en place. Il peut s'agir d'un jeu dit « brise-glace », d'une vidéo ou d'une activité qui a pour objectif d'ouvrir les échanges en les rendant plus clair par des exemples. Il m'a fallu, en peu de temps, trouver une activité sur ce concept, j'y reviendrai dans la suite de mon exposé.
Le jour-dit de la formation, nous étions six formateurs, nous avons vite ressenti les tensions internes. Des remarques négatives de certains professeurs émanaient dès les premiers échanges. Certains parlaient d'infantilisation ou encore de formation inadaptée.
Après une présentation en plénière, l'ensemble de la communauté a été divisée en trois groupes. Avec un collègue formateur-enseignant, nous avions un groupe d'une vingtaine de personnes, professeurs et assistants d'éducation.
Dès le début, quatre professeurs ont refusé de participer. Ils ont demandé que la formation soit adaptée à leurs attentes, c'est-à-dire aux mauvaises relations avec l'équipe de direction, à leurs sentiments de ne plus être écoutés, d'être désavoués face aux élèves et aux familles.
Nous nous efforcions de leur expliquer le principe de la formation et de l'intérêt d'une réflexion plus large sur le Climat Scolaire, avec comme leviers aidant les facteurs systémiques liés à ce concept.
Néanmoins, le groupe n'était pas ou peu enclin à poursuivre. Beaucoup ont refusé de participer aux activités, certains nous coupaient la parole en revenant sur les points présentés en contre argumentant. J'ai vite compris par rapport aux propos tenus et aux quelques échanges que le climat général de cet établissement était effectivement dégradé : certains parlaient d'un stress important, d'arrêts maladie répétés, voire de « burn-out » lourd pour une collègue. Nous avions l'énoncé sans vraiment entendre les causes de cette situation, et surtout, pour moi, sans entendre qu'elles étaient les relations avec les élèves.
L’École est un lieu de vie important pour les élèves et le lieu de travail pour les enseignants. La question de la qualité de vie est un sujet majeur, qui doit être pris en compte pour les deux parties. Toute la communauté éducative est concernée, mais il est clair que la première interaction se joue entre les élèves et les enseignants. Sont venus à moi alors plusieurs questions :
- Comment allait-on évoquer la qualité de vie des élèves alors que celle des enseignants semblait préoccupante ?
- Les questions sur leur santé, sur leurs conditions de travail et surtout sur leurs relations avec leur équipe de direction n'allaient-il pas avoir une incidence sur la formation ?
- Quels étaient les effets sur les élèves ?
Avec ces questions en tête, mon collègue et moi-même avons continué à présenter les sept facteurs du Climat Scolaire, en adaptant et en réajustant notre feuille de route. La formation était construite ainsi : une présentation facteur par facteur en alternant activités et présentations, puis une démarche plus réflexive et plus globale qui permettait de revenir sur les actions et les pratiques menées dans l'établissement.
Le facteur « qualité de vie de l'élève » était le dernier à être présenté. Je devais à ce moment mettre en pratique l'exercice que j'avais préparé avec un questionnement prégnant : comment cet exercice allait-il être perçu par le groupe ?
- Activité proposée sur le concept « Qualité de vie de l'élève »[4]:
Pour construire cette activité, j'avais voulu créer un exercice ludique créant un lien entre les lieux et les espaces d'un établissement et l'émotion qui pourrait y être associée par les élèves. Concrètement, je proposais par voie d'affichage des lieux comme le CDI, le self, la salle d'études, des espaces comme la cour de récréation, un gymnase ou des temps scolaires avec comme illustration un emploi du temps. Sur ces panneaux, il fallait aux participants ajouter deux émotions proposées parmi huit exposées, une première émotion pour indiquer de manière subjective ce que les élèves exprimaient émotionnellement dans tel ou tel lieu, une seconde devait manifester le sentiment vécu par l’intervenant lui-même. Mon objectif était de bien démontrer le lien entre l'aménagement des locaux et le bien-être des élèves. Ainsi, les intervenants pourraient s’approprier concrètement les sentiments des élèves tels que l'insécurité, l'anxiété ou le bien-être, tout en mettant en perspective leurs propres ressentis, et ainsi débuter une réflexion sur des changements ou des améliorations possibles. Les intervenants avaient comme consignes de venir coller les étiquettes représentant les émotions sur les panneaux. Ensuite, les résultats étaient mis en commun afin de voir si les avis de chacun correspondaient.
J'ai pu présenter l'exercice et les consignes. La plupart des participants s'y est prêtée sans difficulté. Cette activité a permis de recentrer les échanges sur la place de l'élève. En effet, au départ lorsque les professeurs ont été interrogés sur leurs pratiques professionnelles protectrices ou à risque sur le concept de qualité de vie à l’École, ils avaient principalement parlé de leurs conditions de vie et de travail.
En résumé, les préoccupations fondées sur mon expérience et mes constats sont à l'origine du choix de mon sujet. Le cheminement regroupant mes activités professionnelles en tant que Conseiller Principal d’Éducation et d'animateur de formation m'a servi de point de départ à une analyse plus fine que je vais poursuivre dans la deuxième partie de mon exposé.
PARTI II
L'analyse des facteurs d'interactions
Le Centre national d'évaluation du système éducatif, Cnesco, a publié en octobre 2017 une série d'enquêtes sous forme d'un rapport autour de la qualité de vie à l'école[5] .
Les contributions pilotées par deux professeurs en psychologie de l'enfant et de l'éducation, Agnès Florin et Philippe Guimard m'ont fourni un support très important pour ma réflexion. Ces documents riches pour mon travail de recherche m'ont permis ainsi de mettre en parallèle les études de professionnels et mon expertise personnelle.
3. Lieux, espaces et temps scolaires
L'architecture scolaire, les aménagements des locaux et l'utilisation des espaces et du temps répondent avant tout à des questions qui ont principalement l'objectif d'organiser les apprentissages et le travail des élèves.
Ces sujets, toujours d'actualité, ne peuvent pas se réduire qu'à des aspects quantitatifs : temps de présence, horaire des programmes ou calendrier annuel.
Avant de s'interroger plus particulièrement sur la transformation contemporaine de l'espace scolaire, il m’apparaît essentiel d'évacuer les contraintes qui me semblent liées directement ou indirectement à cette transformation et qui pourraient être perçues comme des freins à toute volonté de modernisation.
La première contrainte que j'identifie est celle de la propriété. Les acteurs de l’Éducation ne sont pas propriétaires des bâtiments. Depuis la loi de décentralisation de mars 1982, la répartition et la gestion sont dévolues à des personnes morales distinctes de l’État, des élus-es : les mairies pour les écoles, les conseils départementaux pour les collèges et les conseils régionaux pour les lycées. Il est clair que les collectivités territoriales sont investies dans leurs missions éducatives, les restructurations modernes effacent progressivement les traces du passé et s'accordent de plus en plus aux attentes éducatives et pédagogiques. Néanmoins, une deuxième contrainte est corollaire, celle de l'aspect financier. On peut se demander si les disparités financières entre les différentes collectivités ne créent pas des disparités pour l'organisation du quotidien et des apprentissages au sein des établissements scolaires. En effet, d'un département à l'autre, les moyens financiers ne sont pas forcément égaux, même si les engagements politiques sont réels, les budgets dédiés aux fonctionnements des établissements scolaires sont considérables, les priorités vont à l'essentiel dans la perception des multiples responsables. Est-ce qu'on doit comprendre qu'il y a un écart entre les demandes et les attentes des membres de la communauté éducatives et les contraintes de budget des collectivités ?
L'aspect financier ne peut pas être mis de côté. Toutefois, les enseignants et les non-enseignants restent les interlocuteurs privilégies et peuvent faire des propositions quant à l'amélioration des conditions de vie et de travail, en prenant en considération les préoccupations des élèves. De plus, dans le second degré, un établissement scolaire est un Établissement Public Local d'Enseignement (EPLE). Il a une liberté de fonctionnement et d’investissements propres, sous le contrôle du Chef d'établissement et des instances de décision, tel que le Conseil d'Administration. La composition des Conseils d'Administration des EPLE correspond bien aux contraintes concrètes puisque sont réunis des membres de l'établissement, des personnalités extérieures et des élus-es locaux. Les échanges sont possibles et efficaces dans les deux sens, tout en comprenant que les arguments développés par les différents professionnels peuvent diverger : la sécurité des biens et des locaux, la question de responsabilités pour l'un, le partage des lieux de savoirs pour l'autre. La Loi au sens large amène aussi des contraintes qui peuvent prendre le pas sur les réflexions concernant le bâti scolaire et le climat scolaire : les questions environnementales, les conditions d'accès à l'ensemble de la population, plus particulièrement aux personnes à mobilité réduite ou encore l'innovation technologique nécessitant l'utilisation des outils numériques demandant des installations nouvelles.
J'ai souhaité évoquer ces idées car il m’apparaît important sur des temps de formation de poser les limites du réel, et pouvoir mener ainsi des échanges concrets, réalistes et réalisables. Je rappelle aussi que toute contrainte n'a pas un caractère négatif mais qu'elle nous accompagne en donnant un cadre essentiel à nos pratiques professionnelles.
Les travaux de recherche mettent en évidence que le bien-être des élèves est influencé par certaines caractéristiques du bâti scolaire[6]:
Trois facteurs ont été mis en évidence :
- le confort des élèves : lumière, bruit, température
- la satisfaction des besoins d'enseignement et d'apprentissage : pièces identifiables, personnalisées, adaptables à la pédagogie des enseignants et permettant d'être en lien avec le reste de l'école
- l'esthétique : harmonie des couleurs, agencement des différents éléments de la salle de la classe.
Ces facteurs pris de manière négative peuvent être sources de stress et de fatigue pour les élèves. Ils contribuent parfois, à des phénomènes de violence, explicites ou récurrents.
En interrogeant les usagers des établissements scolaires, en particulier les élèves, le sentiment d'insécurité peut être élevé, notamment pour les espaces moins bien surveillés tels que les abords de l'établissement, les sanitaires ou la cour de récréation.
En janvier 2018, j'ai réalisé dans mon établissement, un collège classé en REP+, une enquête auprès des élèves de 6e. Les questions portaient sur le vivre ensemble en prenant en compte différents critères : le phénomène de violence, le sentiment de peur ou de crainte et la notion de conflit. Il ne s'agit pas d'une donnée scientifique mais d'une photographie à un moment donné du ressenti des élèves, des nouveaux entrants. La période choisie pour les interroger correspondait à la moitié de leur première année en Collège, ils avaient un recul suffisant pour renseigner le questionnaire, et pour moi, le temps nécessaire pour analyser les résultats et prévoir des actions d'interventions. Interroger les élèves de 6e m'a permis d'avoir des indicateurs nouveaux, plus proches de la réalité.
Deux constats sortent de cette enquête :
– Trois espaces apparaissent comme anxiogènes : les abords de l'établissement, la cour de récréation et les toilettes. Dans l'idée générale que nous pouvons avoir, ces réponses ne sont pas surprenantes. Toutefois, 57% des élèves interrogés ont répondu qu'ils exprimaient de la peur aux abords de l'établissement et/ou sur le chemin école-domicile.
Une comparaison entre les résultats de mon enquête et celle de deux chercheurs Thibaut Hébert et Eric Dugas[7] établit une certaine similitude
L’espace scolaire le moins sécurisant pour les élèves. Le point de vue des collégiens en fonction de leur âge (choix 1)
– Le second constat est contradictoire : si une grande partie des élèves de 6e disent apprécier les espaces de circulation comme les couloirs, une partie autant significative dit s'y sentir en insécurité.
En premier lieu, les 6è peuvent ressentir moins d’insécurité que les 3è devant le collège en raison d’un temps passé devant l’établissement inférieur à celui des 3è. Cela peut se justifier par la volonté des parents de venir chercher les enfants les plus jeunes à la sortie des cours. Il s'agit ici d'une donnée qui apparaît également dans la notion de climat scolaire, il y a une relation entre l'espace et le temps : plus un élève passe du temps dans son établissement, plus il s'y sent bien. Il en va de même en ce qui concerne la cour de récréation, les élèves de 6e ont tendance à considérer ce lieu comme un espace de divertissement et de défoulement avec des jeux ou des courses, alors que ce lieu leur apparaît de plus en plus comme un lieu de tensions où naissent et s'exacerbent des conflits de toute nature.
Parallèlement, concernant les lieux ressentis comme les plus sécurisants, sans grande surprise, les espaces d’apprentissage (classe et Centre de Documentation et d'Information, CDI) ainsi que la cantine figurent largement en tête des classements. À titre d’exemple, près de 80% des élèves interrogés ordonnent la « classe » dans les trois lieux les plus sécurisants.
La présence d'adultes est donc rassurante mais aussi peu souhaitée par les élèves. Il est clair que les élèves souhaitent exercer une forme de droit de possession des espaces.
Doit-on comprendre que l'adulte doit rester à bonne distance ? C'est-à-dire assez loin pour laisser s'exprimer librement les relations entre les élèves mais assez proche pour intervenir en cas de digression ? Cette harmonie constituerait ainsi un équilibre utile au bien-être de nos élèves-adolescents.
Il s’agit alors d’interroger l’espace scolaire, non plus comme un lieu exclusif de transmission des savoirs et de socialisation, mais comme un environnement innovant au service de pédagogies plus coopératives et du « mieux-vivre » ensemble.
4. Rapports et liens entre les acteurs
La relation enseignant-élève est déterminante au sein de l'expérience scolaire de l'élève. Cette relation joue un rôle d'importance dans l'expérience et les apprentissages scolaires et donc dans le bien-être des élèves à l'école.
La qualité des interactions enseignants/élèves est liée à deux conditions :
- la perception que les enseignants ont de leurs élèves : la qualité de vie scolaire des élèves est souvent associée au caractère sympathique et accessible des enseignants.
- le contexte de l'établissement dans lequel les enseignants travaillent, en particulier l'aspect du climat scolaire de l'établissement.
Concernant les relations entre les élèves, l'appartenance à un groupe de pairs, à l'influence que celui-ci peut exercer sont des éléments essentiels déterminant la satisfaction scolaire des élèves. Les conflits avec les pairs sont à l'origine de plusieurs sentiments négatifs comme le mal-être ou la baisse de l'estime de soi, et de réactions parfois violentes, où l'élève peut emprunter des stratégies d'évitement comme l’absentéisme.
Je reprends dans mon discours l'enquête que j'ai menée auprès des élèves de 6e. En m'interrogeant sur les relations entre les pairs, je me suis demandé si la constitution des classes faite sans l'avis des principaux concernés, les élèves eux-mêmes, aurait un impact sur leurs camaraderies, leurs amitiés voire leurs inimitiés.
Les résultats de mon questionnement sont exposés dans le tableau qui suit.
Il s'avère que les avis sont bien partagés. Toutefois un consensus ne sort pas, c'est -à-dire qu'une partie des élèves, environ la moitié, n'exprime pas une liberté totale au milieu de ses pairs.
Christophe Marsollier, docteur en science de l'éducation, quant à lui, définit trois entraves au bien-être des élèves :
- Le sentiment d'injustice : en s'appuyant sur les enquêtes de la Direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance, DEPP, il apparaît que deux élèves sur trois considèrent que « les punitions données sont très ou plutôt justes ». La justice conditionne véritablement le bien-être des élèves et leur motivation à soutenir, dans la durée leur engagement dans une activité d'apprentissage et ainsi de surmonter les difficultés rencontrées. Les éléments retenus comme injustes par les adolescents concernent une décision, une remarque ou encore une évaluation. Les émotions peuvent être très vives chez ces adolescents et il existe bien souvent une corrélation entre leurs émotions et leur histoire personnelle. C'est pourquoi, en termes de professionnalisation, la recherche de la décision ou de l'intervention la plus juste pour l'élève semble primordiale.
- Les cyberviolences : Il s'agit de comportements violents qui se manifestent sous différentes formes sur les réseaux sociaux : harcèlement, humiliation publique en ligne, agressions verbales. La cyberviolence concerne plus fréquemment les élèves en situation de harcèlement. Elle est souvent accompagnée d'une perception dégradée du climat scolaire et d'une démotivation chez ces élèves. Les victimes sont le plus souvent des adolescentes. Ces formes de violence peuvent porter atteinte à l'intégrité physique et morale et à l'estime de soi. Elles peuvent avoir également, des conséquences importantes sur la scolarité de ces élèves.
- La censure entre élèves : C..Marsollier explique avec cette idée que des élèves qui montrent un intérêt aux sollicitations des enseignants pourraient être sujets aux moqueries d'un élève ou d'un groupe d'élèves. C'est une forme de violence imperceptible qui peut parfois s'installer dans la classe. Certains élèves rencontrent des difficultés à se défendre. Ils expriment alors un sentiment d'insécurité qui nuit à leur réussite scolaire.
Pour conclure cette deuxième partie, le tableau ci-dessous, édité par le Cnesco expose clairement les facteurs déterminants.
Le bien-être des élèves tient à la qualité générale des conditions d'accueil offertes par les équipes éducatives et par les méthodes pédagogiques utilisées par les enseignants :
choisir des supports d'apprentissage stimulants et variés, avoir des pratiques différenciées, respectueuses des rythmes et des difficultés des élèves.
PARTI III
Les compétences et les actions du formateur
5. Amélioration du climat scolaire
La démarche climat scolaire s’articule en trois étapes. La première est de « comprendre », pour pouvoir se créer une culture commune basée notamment sur un vocabulaire commun. La seconde étape est de « diagnostiquer » c'est-à-dire de pouvoir faire un état des lieux de son climat scolaire à l’aide d’outils proposés dans les guides « Agir sur le climat scolaire ».
Enfin, la dernière étape propose d’identifier les ressources à disposition pour « Agir » en entrant dans des actions.
Pour la conduite d’une formation à destination des professionnels de l’Éducation Nationale, il est nécessaire de replacer la méthode « climat scolaire » dans son ensemble. Même si le cœur de la formation s’oriente sur le facteur de la qualité de vie de l'élève, ce dernier doit être repositionné dans la globalité du climat scolaire pour prendre sens. Faire abstraction de l’interdépendance de chacun des facteurs serait une erreur. La vision systémique est capitale pour garantir l’amélioration du climat scolaire. La qualité de la formation est dépendante de l’intégration de cette notion.
L'analyse des nombreuses études sur la recherche des facteurs du climat scolaire démontre que les relations entre enseignants et élèves, et celles entre les élèves influencent incontestablement le sentiment qu'éprouvent ces acteurs dans leur rapport à l'école. Dès le début de mon analyse, j'ai voulu mettre l'accent sur le lien entre le bien-être scolaire des élèves et le bien-être professionnel des enseignants. Les enquêtes nationales de victimation réalisées en France par la Direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance, DEPP, en 2011 et 2013 en collège et 2015 en lycée confirment cette idée. La grande majorité des collégiens et des lycéens connaissent un certain bonheur à venir apprendre dans leur établissement : 93% des collégiens, 94% des lycéens disent «se sentir bien dans leur établissement ».
Comment alors faudrait-il agir pour que ce sentiment de bien-être perdure et se généralise ?
Le métier d'enseignant est un métier de communication, c'est « en s'appuyant sur ses propres habiletés à communiquer qu'un enseignant parvient à créer les conditions les plus favorables aux interactions entre pairs et avec les supports d'apprentissage, et à aider les élèves dans leur processus cognitifs »[8].
Christophe Marsollier décrit ainsi l'éthique relationnelle. Les compétences psychosociales sont mises en avant. L'organisation mondiale de la santé définit les compétences psychosociales comme la capacité d'une personne à répondre avec efficacité aux exigences de la vie quotidienne.
Les enseignants ont été pendant longtemps seuls à se former à la maîtrise de compétences psychosociales par l'analyse de leurs échecs et de leurs difficultés.
Les CPE bénéficient lors de leur formation initiale d'une approche sur ce thème. Pour les enseignants, c'est par l'expérience, par l'expertise, par les retours de leurs collègues, par l'observation du comportement de leurs élèves suite à des maladresses verbales ou gestuelles qu'ils acquièrent ou non cette éthique.
L'étude des effets d'un style éducatif dit « répressif » permet de mettre en place des actions de formation innovantes. Il est vrai que de nombreux adultes, avec toute leur bonne foi, pensent bien faire lorsqu'ils cherchent, par leur autorité verbale, à stopper voire éliminer ce qu'ils considèrent comme de mauvaises attitudes des élèves. Une bonne éducation passerait obligatoirement par la sévérité, les menaces ou l'humiliation. Ce comportement n'a pas à être jugé ou dénoncé, il répond à des pratiques éducatives transmises et des savoir-faire hérités. Mais les analyses de nombreux pédopsychiatres comme Catherine Gueguen, en 2018, montrent que ces méthodes, définies sous le terme de Violence Éducative Ordinaire, VEO, ont des conséquences néfastes tels que :
- mal-être, stress, angoisse
- absentéisme
- démotivation, repli sur soi, décrochage scolaire
- agressivités, harcèlement
- faible estime de soi – addictions diverse.
Les formations d'enseignants, d'équipes et de partenaires de l'école attentifs au bien-être des élèves sont en forte croissance, favorisées par les politiques depuis quelques années.
En 2012, le ministre de l’Éducation Nationale valorise la bienveillance au sein de l’École. La circulaire de rentrée de 2014 parle d'une « autorité bienveillante », d' « une démarche éducative bienveillante » ou encore d' « une évaluation positive et bienveillante ». Les volontés nationales ont continué sous l'impulsion d'hommes et de femmes politiques.
Actuellement, la bienveillance est au cœur de « l'école de la confiance » définie lors de la rentrée 2017 par le Ministre de l’Éducation Nationale.
La bienveillance vise à la fois à sécuriser, à protéger et à créer les conditions d'épanouissement de l'autre, de son bien-être et de ses progrès.
Les temps de formation devront s'efforcer de composer avec l'attachement ancré aux traditions de l'école de certains enseignants, comme : préparer les élèves à la difficulté de la vie professionnelle, acquérir la rigueur, la discipline, renforcer l'autorité et l'effort. Il ne s'agit pas de renier ces idées mais d'accompagner les démarches qui aideraient à lever certaines résistances :
- en sensibilisant les enseignants aux enjeux de la bienveillance dans les pratiques éducatives et pédagogiques
- en expliquant en quoi la manifestation de la bienveillance relève de l'éthique professionnelle.
Aussi, sur ces temps d'interventions, il est nécessaire d'associer des axes de professionnalité : le plan cognitif et le plan émotionnel.
Sur le plan cognitif, l'enseignant doit pouvoir prévenir les difficultés et apprécier les progrès réalisés. Les choix didactiques et l'aide pédagogique seront apportés de manière à susciter et entretenir la motivation des élèves à apprendre.
Sur le plan émotionnel, la prise en compte et l'accompagnement des émotions des élèves mobilisent des compétences. Celles-ci suscitent une certaine réflexion quant à ses propres émotions et à sa réactivité.
Il est essentiel d'intégrer ces concepts lors de formation dans lesquelles les questions relationnelles sont étudiées.
6. Amélioration des relations enseignants-élèves
Afin de pouvoir étayer mon analyse par une démonstration d'un outil de formation, il est possible d'appuyer mon raisonnement à partir d'une action de formation concernant la prévention et la gestion des conflits.
Dans les relations, les conflits sont inévitables : « les organisations humaines butent immanquablement sur un défi : comment faire œuvrer de concert des personnes qui ont des intérêts, des trajectoires, des représentations et des systèmes de valeurs différents ? »[9] Il est donc utile de développer les compétences relationnelles de tous : enseignants, encadrants et élèves. Il s'agit ici d'un levier important dans l'amélioration d'un climat scolaire serein et d'aborder une pratique essentielle pour les métiers de l'éducation, la communication.
Je vais présenter des axes de formation possibles étape par étape. Il s'agit d'un exemple issu de mon travail de recherche et d'analyse, les propositions et les outils présentés ne constituent pas une énumération exhaustive. Cette formation peut être destinée à un public divers, enseignant ou non-enseignant, sur une durée d'une demi-journée.
- Analyse des besoins de formation :
Il s’agit de repérer quelles sont les compétences que les formateurs veulent transmettre aux participants, plus précisément quelles sont les activités concernées, les savoir-faire qui sont en jeu, les modes opératoires, les conditions de travail dans lesquelles s’exercent ces activités, les connaissances théoriques qui sous-tendent l’action.
Il peut s'agir d'une demande d'un chef d'établissement ou d'un stage proposé au plan académique de formation.
- Trame de l'action de formation :
A partir des données récoltées ou de la « commande », le (ou les) formateur(s) définit un programme, avec des séquences, chacune ayant un objectif, des modalités pratiques, des supports pédagogiques. Il s’agit du « déroulé pédagogique » ou du « canevas » de la formation. Il sert au formateur à construire son action, à prévoir les modalités d’évaluation et de suivi du déroulement de l’action.
- Conception de l'action de formation :
Tout au long de la formation, les intervenants veillent à développer une pédagogie qui alterne les différents temps d’apprentissage, de confrontation d’expérience, de pause (éviter de donner l’image d’un cours scolaire). Il est également souhaitable de prévoir des séquences de « vérification » des acquis intermédiaires : par un QCM, une reformulation ou un exercice simple. Le formateur suit la progression du groupe.
- Séquence 1 : Présentation de la formation
Les formateurs se présentent, ainsi que le déroulement de la formation et annoncent les objectifs. La prise de contact avec le groupe s'opère par l'installation d'une ambiance bienveillante et libre.
- Séquence 2 : Prise de contact avec le groupe
La séance commence en partant des représentations des participants concernant la notion de conflit, leurs ressentis ou leurs craintes sur ce sujet. Cette étape est rythmée par un jeu brise-glace (« dixit » : jeu de cartes illustrées). Les participants s'installent en cercle après avoir choisi l'une des cartes proposées. A tour de rôle, chacun se présente et présente sa carte en expliquant son choix, le formateur se doit de relancer avec prévenance chaque participant sans jugement.
- Séquence 3 : Définitions des termes : conflits, agressivité, violence
En cherchant à mettre les participants en action et pour créer une adhésion du groupe, un atelier sur la constitution d'une définition de la notion de conflits est proposé.
Sur un feuillet collant (post-it), chacun écrit un mot, un adjectif, un verbe afin de donner une définition du mot conflit. Plusieurs feuillets sont possibles.
Chacun vient ensuite déposer sur le tableau. Au fur et à mesure, il est demandé aux participants d'essayer d'organiser leurs « mots ».
Par la suite, un apport théorique est poursuivi. La définition proposée par les participants est comparée à celle préparée par les formateurs.
- Séquence 4 : Causes et résolutions des conflits
L'activité se poursuit en proposant à chacun d'exposer une situation conflictuelle rencontrée, racontée ou imaginée selon les volontés de chacun. Le formateur veille à prendre soin des propos des formés, à faire respecter leur choix et à ménager leurs ressentis.
Chaque participant note brièvement un conflit rencontré sur le haut de feuille. Il passe cette feuille à son voisin qui note, après un temps de réflexion une proposition de résolution. Il plie ensuite la feuille pour que sa proposition reste cachée et la passe à son voisin qui note à son tour et ainsi de suite jusqu'au retour complet vers l'émetteur. Chaque participant décrit un conflit pour lequel il n'a pas forcément de solutions ou pour lequel il a pu se sentir démuni (il note son prénom ou un signe distinctif sur sa propre feuille). La feuille est dépliée, des idées, des solutions ou des préconisations sont notées.
- Séquence 5: Illustrations par des études de cas et outils
Il est ensuite proposé aux participants de faire émerger, en travail de groupe, une situation de conflit vécue, racontée, redoutée et de l'illustrer afin de la présenter au groupe.
Du matériel est mis à leur disposition, ils peuvent ainsi constituer un support de présentation : carte mentale, panneau, dessins, scénettes.
Chaque groupe travaille sur une situation de conflit-type :
- élève/élève
- enseignant/enseignant ou autre collègue
- enseignant/parent
- élève/enseignant
Lors des présentations, le formateur veille à faire réagir les groupes-observateurs, à reformuler les propos tenus par le groupe-présentant et à interagir avec des éléments en lien avec les compétences psychosociales.
Je propose de citer trois exemples :
- L'écoute active
L’Ecoute Active consiste en une reprise des propos de l’interlocuteur, mais également du ou des ressentis qui les accompagnent et qui ont été perçus par le praticien. Puis, ces propos sont reformulés dans une phrase utilisant le plus souvent des mots différents et comportant une légère hypothèse d’interprétation.
- La communication non violente
La communication non violente s’attache à instaurer entre les êtres humains, des relations fondées sur une coopération harmonieuse, sur le respect de soi et des autres.
Cet outil de communication verbale est recommandé pour la résolution de conflits et permet de développer une meilleure relation à soi. Sa pratique repose sur l'expérimentation d'un nouveau modèle qui a pour principaux objectifs, l'identification des sentiments, des besoins et la formulation d'une demande en vue de les satisfaire. Cette approche est bénéfique pour communiquer avec davantage d'authenticité.
- La médiation
La médiation est une pratique ou une discipline qui vise à définir l'intervention d'un tiers pour faciliter la circulation d'information, éclaircir ou rétablir des relations. Ce tiers neutre, indépendant et impartial, est appelé médiateur. La définition de cette activité varie selon les contextes d'application.
Ces trois exemples présentés peuvent constituer chacun une formation à part entière. Dans ces formations, notre thématique la qualité de vie à l'école, aisément peut être développé puisque les relations entre les adultes et les élèves, et celles entre les élèves sont au cœur des études.
Autre exemple majeur, la médiation par les pairs est un élément clef pour l'amélioration de la qualité de vie à l'école. Ce dispositif qui a comme approche de favoriser la recherche de solutions de conflits entre les élèves par des élèves formés offre des techniques de communication tant aux élèves médiés qu'aux élèves médiateurs.
Ce sont aussi des procédés d'échanges qui peuvent être repris par les adultes lors d'entretiens individuels ou collectifs.
Le formateur, à l'aide de fiches et d'outils, entreprend de susciter l'envie chez les formés d'appliquer, dans leurs pratiques professionnelles, ses techniques de communication. Il veille aussi à laisser des ressources : auteurs, ouvrages, sites, afin que les participants puissent volontairement poursuivre leurs propres recherches. Il peut aussi avoir préparé un document ou un livret réunissant les références évoquées et un résumé des sujets abordés.
– Evaluation :
L'action de formation se termine par un temps d'échanges et de synthèse.
A l’issue de la formation deux points importants sont à souligner :
- Le formateur prévoit une évaluation des acquis de la formation, c’est-à-dire qu’il mesure si les objectifs sont atteints en totalité ou partiellement.
- Le formateur demande par ailleurs aux stagiaires d’évaluer la formation (tant en termes de contenu que d’organisation ou de niveau d’atteinte des objectifs poursuivis).
Ces deux formalités ont le double intérêt de répondre à l’exigence réglementaire (évaluer) et de porter une analyse sur la formation (et les points d’amélioration possibles).
Le formateur peut conclure son intervention par une perspective concrète sur le sujet et, bien sûr en remerciant de l'écoute et de la participation de tous.
La qualité de vie de l'élève à l'école est un élément systémique du Climat Scolaire. Avec cet exemple, j'ai voulu démontrer que les approches sont variées. Une communication sereine, sans jugement et attentive aux besoins de chacun contribue au bien-être de tous, de nos élèves en particulier.
Conclusion :
Le concept de qualité de vie à l'école est un vaste sujet. Mener une réflexion sur cette idée m'a permis de démontrer une partie des éléments et des facteurs qui interviennent. L'établissement, l'école, le collège ou le lycée, considéré alors comme une entité à part entière, impulse des rythmes, influence des vies et a un impact sur la réussite des élèves.
Or, un établissement n'est pas qu'une succession de salles, de classes ou de lieux divers, il est avant tout composé et animé par des personnes, par des professionnels et par des usagers qui chaque jour viennent y vivre et travailler.
La cour de récréation, la cantine, la salle de classe ne sont pas que des endroits inertes qui prennent vie à l'arrivée des élèves mais constituent ensemble un mélange subtil qui fait de ces espaces des lieux d'apprentissage fondamental. Des liens vont se créer, des relations vont se confronter, parfois difficilement pour les élèves. L'adulte, lui aussi, va être à la fois un élément déterminant pour les apprentissages des élèves, mais aussi il peut éprouver des difficultés voire des souffrances sur son lieu de travail.
Il est utile de prendre en compte la parole des principaux acteurs. Des instances comme le Conseil de Vie lycéenne et le Conseil de Vie Collégienne laissent désormais la possibilité aux élèves de donner des avis concrets sur leur cadre de vie, mais aussi d'impulser des propositions voire de les réaliser.
D'autant que la réflexion n'est pas close, le sujet ouvre des perspectives telles que, par exemple, la promotion de la santé des élèves et l'implication des différents professionnels dans ce domaine.
En élaborant ce mémoire, j'ai pu mettre en parallèle mon métier de CPE et la fonction de formateur en devenir. Ces deux années passées à préparer le Certificat d'Aptitude aux Fonctions de Formateur Académique ont mis en adéquation ces deux fonctions.
En effet deux points sont à mettre en évidence : la nécessité de préparer nos interventions et la co-animation.
En effet, il est nécessaire de préparer nos interventions lorsqu'elles se déroulent face aux adultes et face aux élèves. Lors des temps de communication, il est important de se demander qu'elle sera la meilleure phrase, quel argument sera le plus juste. Cette démarche se retrouve également lors des interventions sur des modules de formation. Il faut être compris, être bien compris. Le temps passé à préparer et à rechercher afin de constituer des actions est bénéfique aux activités professionnelles d'un CPE et vice versa. Par ailleurs, les interventions ne se font pas seul, le travail d'équipe est à privilégier. Ainsi, lors des formations, la co-animation est une force tant pour les temps de préparation que pour ceux de l'animation.
Ce mémoire reflète pour moi l'état d'esprit que j'ai pu avoir lors de mes expériences de formation.
Il a établi des liens entre la recherche et le quotidien. Ainsi, une idée très importante est à garder en tête, que ce soit dans mon métier ou dans des futures fonctions de formateur, il est essentiel de rester continuellement en recherche d'amélioration, c'est-à-dire de rester un CPE en évolution, un formateur en formation.
Bibliographie
Ouvrages
- L'éthique relationnelle, une boussole pour l'enseignant, Christophe Marsollier, Canopé, 2016
- Le climat scolaire, pour une école bientraitante, Marie Odile Le Masson, Chronique social, avril 2014
Articles
- Quels espaces scolaires pour le bien-être relationnel ? Enquête sur le ressenti des collégiens français, Thibaut Hébert et Eric Dugas, Education et socialisation, 2017
- Le climat scolaire, Cahiers Pédagogiques, n° 523, septembre-octobre 2015
Sitographie
- La qualité de vie à l'école, CNESCO, octobre 2017
- Concevoir des formations pour aider les enseignants à faire réussir tous les élèves,IFE, Université de Lyon
- Référentiels d'activités et de compétences, Réseau National des Universités préparant aux Métiers de la Formation.
ANNEXE 1
Les sept facteurs du Climat Scolaire
ANNEXE 2
Une activité sur la qualité de la vie de l’élève proposée lors d’une formation sur le Climat Scolaire
L'objectif est de lier un lieu/un outil à une émotion selon son vécu ou son ressenti, en deux temps : pour l'élève et pour l'adulte.
Consignes :
- Rappeler que le Collège est un lieu de travail et un lieu de vie pour l'ensemble de ses membres (les élèves passent souvent plus de temps dans leur établissement que les professeurs).
- 12 panneaux sont présentés en reprenant 12 lieux ou outils du quotidien de l'élève : la cour, la cantine, les emplois du temps, le bureau du CPE, du principal, le trajet, le CDI, le gymnase, la salle d'études, les couloirs, les toilettes des élèves et la salle des professeurs. – Un volontaire vient pour chaque panneau afficher deux émotions (prévoir pâte collante) : une, qui selon lui serait identifiée comme celle des élèves majoritairement et une autre pour son propre ressenti. Les lieux sont choisis volontairement pour créer des réactions. Objectifs :
- Soulever ainsi des pistes de réflexion : bonne organisation des locaux, des oublis pour les élèves
- Mettre en perspectives des changements ou des améliorations possibles en prenant en compte les contraintes de l'EPLE
Durée de l'activité : 10 minutes
[1] Définition National SchoolClimate Center (COHEN et ALII, 2012 in press)
[2] Cf. Annexe 1 Les sept facteurs du climat scolaire
[3] Guide «Agir sur le climat scolaire au collège et au lycée» et article site Ministère Education Nationale
[4] Cf Annexe 2: activité de formation «qualité de vie de l'élève»
[5] La qualité de vie à l'école, CNESCO, octobre 2017
[6] Cnesco, la qualité de vie à l'école, octobre 2017
[7] Quels espaces scolaires pour le bien-être relationnel? Enquête sur le ressenti des collégiens français
[8] L'éthique relationnelle, une boussole pour l'enseignant, Christophe Marsollier
[9] Le climat scolaire, pour une école bientraitante, Marie Odile Le Masson
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