
La formation : un levier pour trouver sa place au sein d’un binôme de co-enseignement.
Economie et gestion commerciale
Certification d’aptitude aux fonctions de Formateur Académique
Académie de Reims session 2022-2024
Mémoire professionnel
Discipline : Economie gestion option marketing
Titre : La formation : un levier pour trouver sa place au sein d’un binôme de co-enseignement
Auteur : BOULAGROUNE Houria
Remerciements
Guidée par un désir d’apprendre, tout au long de la construction de ce mémoire professionnel adossé à la recherche, je tiens à exprimer, en premier lieu, toute ma reconnaissance et gratitude à mon IA-IPR d’économie gestion de l’Académie de Reims, Isabelle GUMILAR, qui m’a témoigné sa confiance pour intervenir au sein de la formation continue des professeurs du second degré à l’occasion de deux actions de formation. C’est dans ce cadre que j’ai pu exercer et développer mes compétences professionnelles de formateur débutant, au service des collègues qui pratiquent le co-enseignement.
Je remercie également les membres de mon jury qui ont accepté de participer à ma soutenance et à l’évaluation de ce mémoire ainsi que mon référent académique, Yann Hemmerling, qui a su nourrir mes réflexions et mes questionnements. Son accompagnement m’a été particulièrement précieux pour mener à bien ce travail.
Je tiens également à remercier mes formateurs qui, dans le cadre de la préparation à la certification d’aptitude aux fonctions de formateur académique, m’ont accompagnée et orientée dans ce travail, avec toujours beaucoup de bienveillance.
J’adresse toute ma reconnaissance à Virginie, mon binôme, et Camille pour le partage de leurs savoirs, de leurs réflexions et pour leur soutien, leurs conseils et relectures précieux tout au long de cette expérience. Nos échanges ont contribué à mon cheminement et continuent de me faire cheminer. Je tiens à leur exprimer toute ma gratitude et mon amitié.
Toute ma reconnaissance va aux nombreux collègues rencontrés en formation, qui se sont prêtés à des dispositifs de formation, et avec lesquels les échanges ont toujours été très fructueux.
Je tiens à remercier ensuite tous les enseignants qui ont accepté mes immersions dans leurs cours et de participer à mes entretiens. Mon mémoire est le fruit des perceptions et des expériences qu’ils ont bien voulu partager avec moi.
Enfin, j’aimerais remercier tous mes collègues et amis, avec qui je n’ai cessé d’échanger sur des questions pédagogiques, et dont les idées ont été très précieuses.
1. Cadre théorique et institutionnel du co-enseignement
1.1.1. De l’idée de départ : la co-animation.
1.1.2. Vers le co-enseignement institutionnalisé dans le second degré.
1.2. Définition du co-enseignement.
1.2.1. Une forme aboutie de la co-intervention.
1.2.2. Une pratique collaborative qui crée une relation d’interdépendance.
1.3. Les retombées positives sont actées.
1.3.1. Pour les élèves et l’institution.
2.1. De deux actions de formation.
2.1.1. Action de formation 1 disciplinaire : optimisation de la co-animation.
2.1.2. Action de formation 2 : la co-intervention en pratique.
2.2.1. Observation de séances de co-enseignement
2.2.2. Entretiens semi-directifs.
3.1. Les barrières conscientes.
3.1.1. Le co-enseignement : une pratique perçue comme contraignante.
3.1.2. Une pratique qui empêche l’enseignant d’être seul maître à bord de sa classe.
3.2. Les résistances inconscientes.
3.2.1. La peur du regard de l’autre et du changement
3.2.2. Le statut du professeur influencerait la place du binôme.
4. Solutions pour trouver sa place au sein du binôme.
4.1. Entrer dans la confrontation ou se faire confiance.
4.1.1. De la nécessité du conflit
4.1.2. A une confiance mutuelle au sein du binôme.
4.2. Former les personnels à la co-préparation.
4.2.1. Configurations de l’espace possibles.
4.2.2. Croisement des disciplines.
4.3. initiation aux autres étapes du processus de co-enseignement
4.3.1. La co- animation : s’observer, s’écouter, pour s’ajuster réciproquement
Introduction
« Co-enseigner c’est être coresponsable de la classe et à égalité. (…) Si on se trompe, c’est à deux qu’on se trompe, et si on réussit c’est à deux qu’on réussit. » (Rachel Harent,2023)
Nous sommes au mois de juin 2019, la fin de l’année scolaire approche et il est temps de préparer la rentrée suivante. Réunis en conseil d’enseignement disciplinaire, pour la formulation des vœux des enseignants et la future répartition des services de l’année scolaire 2019-2020, l’équipe de direction me propose de coanimer avec une collègue d’anglais, le cours d’Enseignement Technologique en Langue Vivante(ETLV)[1] en classe de première en Section Technologique Management et Gestion(STMG), à raison d’une heure par semaine. Le jour de la pré-rentrée, je découvre sur mon emploi du temps le nom de mon binôme. Le premier cours d’ETLV n’aura lieu qu’une semaine après la rentrée afin de nous permettre de préparer notre première intervention.
Cet enseignement à deux, appelé co-enseignement réunit dans un même espace, au même moment, deux professeurs : un enseignant de matière générale, en l’occurrence ici l’anglais et un professeur de management. Le cours doit se dérouler en langue étrangère, une opportunité pour moi de pratiquer l’anglais, avec un droit à l’erreur linguistique, qui rassure les élèves quant à leur niveau et facilite la remédiation et l’expression décomplexée à l’oral. Malgré tout, j’ai éprouvé des difficultés pour mémoriser les noms des élèves, en raison du volume horaire hebdomadaire restreint (une heure par semaine) alors que ma collègue retrouve les élèves, une heure trente de plus hebdomadaires. En février 2021, mon binôme s’absente jusqu’à la fin de l’année et je collabore avec une nouvelle collègue d’anglais. Il m’arrive de me sentir seule dans ce cours pourtant en binôme, voire inexistante vis à vis des élèves qui me sollicitent peu. Je ressens un malaise grandissant et un problème de reconnaissance.
Ce manque de reconnaissance m’a questionnée tant sur les difficultés à travailler en binôme avec une personne que l’on ne connaît pas que sur ma légitimité dans ce cours en co- enseignement, pratique professionnelle qui fera l’objet de ce mémoire.
Je me suis donc demandée comment trouver sa place dans cet enseignement à deux ?
Cette question principale n’est pas sans soulever d’autres interrogations autour de la place de chaque binôme qu’il serait intéressant d’analyser: Forme- t-on un « couple de travail » avec un rôle, et des tâches attribuées ? Le partage des rôles et des tâches n’est peut-être pas équitable ?Peut- on tendre véritablement vers un équilibre des rôles ?Si tel est le cas, grâce à quelle posture et quels ajustements ?
Le co-enseignement suscite naturellement des angoisses et des résistances. L’objectif de ce mémoire est de les identifier et de tenter de les expliquer pour ensuite réfléchir aux leviers de réussite de cette collaboration.
Une méthodologie composite qualitative a été privilégiée afin de collecter des données. Ainsi, c’est grâce à des actions de formation menées en parallèle de ma préparation à la certification d’aptitude aux fonctions de formateur académique, que j’ai pu mesurer le ressenti des professeurs qui pratiquent le co-enseignement, comprendre et vérifier l’origine de leurs résistances, et échanger sur leurs pratiques. Puis, ma recherche a été complétée par des immersions en classe suivis d’entretiens semi-directifs afin d’alimenter ma réflexion et de comprendre les rôles respectifs des enseignants dans un contexte de co-enseignement.
J’ai voulu vérifier que la place de chaque enseignant à l’intérieur du binôme était variable et qu’il existait effectivement un déséquilibre des rôles. Ces différences sont peut-être déterminées par des facteurs institutionnels mais pourraient être aussi liées à des résistances inconscientes.
Pour répondre à ce questionnement, ce mémoire professionnel est structuré en quatre parties. Dans une première partie, je présenterai le cheminement de ma réflexion qui m’a conduit vers le choix d’aborder le co-enseignement institutionnalisé dans l’enseignement secondaire puis je tenterai, à travers une revue approfondie de la littérature existante sur le sujet, de définir ce concept. Dans une seconde partie, je décrirais ma méthodologie de recherche en expliquant comment j’ai collecté des données et comment je les ai exploitées. Dans une troisième partie, je recenserai et expliquerai les résistances liées au co-enseignement pour enfin aborder en dernière partie les solutions possibles afin de trouver sa place dans cette pratique pédagogique.
1. Cadre théorique et institutionnel du co-enseignement
1.1. Cadre de ma réflexion
1.1.1. De l’idée de départ : la co- animation
Partant de mon expérience personnelle dans le cadre de l’enseignement en binôme en ETLV, j’ai décidé de réfléchir initialement à la manière d’optimiser la co- animation. Le terme de co- animation est régulièrement employé dans les échanges entre enseignants. Il est défini comme l’action réalisée par deux ou plusieurs personnes d’animer un groupe ou encore l’ensemble des moyens et méthodes mis en œuvre pour faire participer activement les membres d’un groupe. « Animer c’est donner vie au groupe (anima signifie souffle, vie) et co- animer c’est le faire à plusieurs » (Rachel Harent,2023, le co-enseignement en pratique, chapitre 1, p11))
Ce terme apparait essentiellement dans différents référentiels, des métiers du professorat aux compétences de formateurs académiques ou encore au sein des diplômes préparés. La notion « d’animation conjointe » est évoquée. Ainsi en parcourant les différents référentiels du second degré, la notion d’animation, de pilotage conjoint ressort. A titre d’exemple, dans le référentiel du Brevet de Technicien Supérieur, Support à l’action managériale, il est précisé que « les ateliers de professionnalisation sont animés et pilotés conjointement par deux membres de l’équipe pédagogique en charge des enseignements professionnels, de CEJM, de français et langue vivante ». [2]
Il apparaît également dans le référentiel des formateurs académiques parmi les quatre domaines de compétences du formateur. En effet, le domaine de compétence 2. Mettre en œuvre - Animer précise que le formateur est amené à « co- animer une formation et faire bénéficier les apprenants de la richesse d’une dualité de propositions ».[3]
Après avoir mené une première action de formation disciplinaire sur cette thématique auprès des collègues intervenant en ETLV et mes premières lectures, je me suis rendue compte que la co- animation n’était qu’une étape du co-enseignement, pratique pédagogique qui va au-delà de la simple animation et s’entend donc comme un processus. Une phase primordiale de préparation précède la co- animation, la dernière étape étant la phase d’évaluation.
1.1.2. Vers le co-enseignement institutionnalisé dans le second degré
Dans ma quête de savoirs, j’ai découvert que le terme privilégié par les textes officiels pour aborder l’enseignement à deux est la co-intervention. Parmi les différences entre ces deux concepts, la co-intervention met en jeu un enseignant et une autre personne, elle-même enseignante ou pas, alors que ma problématique repose autour la place des deux enseignants qui forment un binôme. C’est pour cette raison que j’ai préféré me centrer sur le co-enseignement, particulièrement dans l’enseignement secondaire. En effet, la littérature et la réflexion autour du co-enseignement dans le premier degré est très riche notamment avec la mise en place du dispositif « plus de maîtres que de classes » en 2013. Mon intérêt s’est donc porté vers la pratique du co-enseignement dans le second degré[4].
De la même façon, j’ai choisi de porter ma réflexion sur le co-enseignement institutionnalisé plutôt qu’expérimental c’est parce qu’il s’est largement répandu dans l’enseignement secondaire, au collège, initialement par l’introduction des enseignements pratiques interdisciplinaires (EPI), puis par la mise en place des heures complémentaires, et au lycée tant dans l’enseignement technologique que professionnel au cours de la dernière décennie.[5]
1.2. Définition du co-enseignement :
1.2.1. Une forme aboutie de la co-intervention
Pour comprendre l’émergence du co-enseignement, il faut d’abord se pencher sur sa source : la co-intervention. Pratique pédagogique importée des Etats Unis en 1970, on ne peut que constater la richesse des réflexions sur cette thématique par des universitaires canadiens et français. Arrivée en France dans les années 90, la co-intervention a été initiée d’abord dans les classes de réseau prioritaire RASED et ULIS puis en primaire dans le cadre du dispositif « plus de maîtres que de classes » pour enfin se répandre en lycée dans les séries technologiques et professionnelles au cours de la dernière décennie.(Toullec-Théry et Marlot, 2014) cité par Eric Couvert, Myriam Janin,2020).
De la primaire au lycée en passant par le collège et l’enseignement supérieur, à tous les degrés d’enseignement et dans toutes les disciplines, cette pratique s’est largement diffusée ce qui témoigne de sa richesse et ses bénéfices.
Les objectifs pédagogiques de la co-intervention sont multiples. L’objectif de départ de la co-intervention était de favoriser l’inclusion des publics puis de faire face à leur hétérogénéité, d’apporter des solutions pour favoriser la démarche projet et surtout la pédagogie différenciée. Il s’avère que nous accueillons de plus en plus d’élèves avec des handicaps non visibles de prime abord (dyslexie, dysorthographie, dyscalculie, allophones…).
Il convient maintenant de définir plus précisément la co-intervention pour la distinguer du co- enseignement. La co-intervention correspond à l’intervention conjointe de deux intervenants avec un même groupe d’élèves au sein d’un même espace ou pas. Ainsi, cette modalité pédagogique ne nécessite pas forcément une unité de lieu, ni même une unité temporelle à l’inverse du co-enseignement. La co-intervention donne donc la possibilité d’évoluer dans deux espaces distincts avec des objets d’apprentissage qui peuvent être différents.(figure 1 et 2).
A l’inverse de la co-intervention, Marylin Friend and Lynne Cook (2007) puis Philippe Tremblay (2015,p36) s’accordent pour définir le co-enseignement comme un travail pédagogique en commun, dans un même groupe, temps et espace, de deux enseignants qui partagent les responsabilités éducatives pour atteindre des objectifs spécifiques. Le co-enseignement implique donc un partage de l’enseignement entre deux enseignants avec un groupe classe portant sur un même objet didactique, et une interdépendance entre les deux adultes. Les deux enseignants peuvent donc avoir des actions identiques ou différenciées dans leurs rôles, leurs conduites et leurs postures.
Selon plusieurs auteurs (Friend et Cook, 2013 ; Hartnett et al. 2013), le co-enseignement concerne les situations où deux enseignants travaillent ensemble pour planifier, organiser, enseigner et évaluer les élèves, En ce sens, le co-enseignement se définit comme un processus (figure 3). Il concerne autant la co-planification que la co-évaluation, et mais également la prestation d’enseignement en classe. Dans cette optique, le co-enseignement constitue une action conjointe planifiée et délibérée (Tremblay, 2020).[6]
La préparation est ici commune. En effet, dans le cadre de cet enseignement, la prise en charge du cours se fait de manière conjointe, c’est-à-dire que les deux professeurs interviennent ensemble dans la même salle ce qui n’est pas forcément le cas avec la co-intervention.
En résumé, les notions de co-intervention ou co-enseignement ont largement été discutées et définies. Dans le cadre de notre réflexion, nous retiendrons la définition suivante du co-enseignement : pratique qui réunit deux enseignants dans un même espace, dans un même temps avec le même groupe d’élèves sur un même objet d’apprentissage. (Cook and Friend 2013 et P. Tremblay 2017).
1.2.2. Une pratique collaborative qui crée une relation d’interdépendance
En adoptant le co-enseignement, l’enseignant passe de l’isolement à la collaboration. L’isolement concerne l’enseignant qui travaille seul. A l’inverse la collaboration réunit des enseignants qui partagent volontairement un but, ils mettent en commun des idées et réalisent ensemble la totalité des tâches nécessaires à la réalisation des objectifs.[7]
Les textes officiels reprennent cette nécessité pour les enseignants de collaborer avec leur équipe et donnent tout son sens à la notion de co-enseignement. Ainsi, la compétence 10 du référentiel des métiers du professorat précise que le professeur doit « coopérer au sein d’une équipe ». Son intervention doit s’inscrire dans un cadre collectif, au service de la complémentarité et de la continuité des enseignements comme des actions éducatives et il doit collaborer avec son équipe à la définition des objectifs et à leur évaluation. Cette compétence met en exergue l’importance du co-enseignement qui répond à cette problématique de collaboration.
De la même manière, le projet académique 2022-2026 reprend cette idée de collaboration dans son ambition 4, objectif 11 : « échanger, collaborer, co- construire pour faire vivre le collectif ».
Certains auteurs articulent la définition de la collaboration autour de l’élève et mettent en avant son but ultime, à savoir la réussite des élèves. « Collaborer c’est développer une intelligence collective en poursuivant un but commun, qui vise la réussite des élèves, l’atteinte de leur potentiel tout au long de leur parcours scolaire ». (Portelance, Pharandet, Borges,2011), cité par Claire Beaumont et al. 2019, CTQPRQ p5).
Cet objectif d’intelligence collective qui consiste à partager, échanger et construire ensemble incombe également au formateur au travers de ses actions de formation. C’est l’impulsion insufflée au cours du discours d’inauguration de l’EAFC (Ecole Académique de Formation Continue) du 14 octobre 2022 qui invite les formateurs à créer une communauté de pratiques dont le but final est la réussite des élèves et le développement professionnel du professeur.
Co- enseigner est donc une pratique collaborative. Peut-on la qualifier de pratique coopérative ? La collaboration existe quand des enseignants travaillent ensemble pour élaborer des projets, des séances d’enseignement. Quant à la coopération, elle désigne la mutualisation du travail entre différents enseignants qui vont œuvrer ensemble dans une situation d’enseignement face à des élèves. C’est le cas du co-enseignement, pratique qui peut être à la fois considérée comme collaborative et coopérative.
Le co-enseignement est le fruit d’une coopération entre deux personnels enseignants, aux compétences spécifiques, au sein d’un même espace. Il est défini comme « le partenariat entre un enseignant régulier et un enseignant spécialisé dans le but d’enseigner conjointement, dans une classe de l’enseignement régulier, à un groupe hétérogène d’élèves, afin de répondre à leurs besoins d’apprentissage de manière flexible et délibérée» (traduction libre tirée de Benoit et Angelucci, 2019).
Enfin, le co-enseignement repose sur une relation d’interdépendance. En effet, on est interdépendants lorsque le travail est commun avec un cadre de référence commun. Le co-enseignement implique l’intervention de deux enseignants avec des disciplines qui se croisent et prennent appui sur les référentiels respectifs. Il serait intéressant pour le formateur d’observer in situ les relations entre les enseignants et de voir comment ces derniers peuvent passer d’un stade d’indépendance à l’interdépendance.(figure 4)[8],
La collaboration nécessite un niveau élevé d’interdépendance, les équipes qui collaborent partagent leurs connaissances, leurs expériences, leurs habiletés et leurs compétences individuelles dans le but de résoudre des problèmes communs.(claire Beaumont,2019,p5). Une confiance mutuelle entre les membres du binôme semble alors essentielle.
1.3. Les retombées positives sont actées
1.3.1. Pour les élèves et l’institution
Le co-enseignement vise à améliorer la qualité de l’enseignement offert à tous les élèves (Tremblay 2015 cité par France Dubé et al. 2019). En effet, cette pratique réunit deux experts dans leur domaine avec deux personnalités différentes, deux façons d’enseigner et deux points de vue ce qui ne peut que profiter aux élèves en difficulté. Par ailleurs, un binôme qui fonctionne bien aura un impact positif sur les élèves qui se sentiront bien à leur tour. Par exemple, dans l’enseignement professionnel, le co-enseignement permet une complémentarité des regards des enseignants des pôles professionnels et des disciplines générales que les élèves rencontreront dans leur futur métier. Le co-enseignement devient une façon d’enseigner autrement les matières générales français, mathématiques, physique chimie. Les élèves ont ainsi une meilleure perception de leur parcours de formation (p4 Vademecum mettre en œuvre la co-intervention, Académie de Reims, juin 2019)
Les modalités de mise en œuvre du co-enseignement (par le travail en groupe notamment) renforcent les interactions avec les élèves, et limitent la stigmatisation en facilitant un enseignement individualisé. L’élève en difficulté est guidé et peut interagir plus efficacement avec l’enseignant et ses pairs. Il peut progressivement développer des compétences d’autonomie et de coopération.
Si les retombées du co-enseignement sont positives pour les élèves, cette pratique répond également à des enjeux de fédération pour l’institution en favorisant le travail d’équipe et en encourageant les enseignants à créer des pratiques innovantes. Le système éducatif accueille une diversité d’élèves avec une volonté inclusive et dans l’objectif de les faire réussir.
A ce titre, le rôle de la direction d’un établissement pourrait être de mettre en place des stratégies pour briser l’isolement des enseignants en administrant par exemple des ressources pour améliorer les conditions de travail des co-enseignants (favoriser un créneau commun libre dans l’emploi du temps, classes dédoublées, espace disponible). C’est un soutien et une source d’encouragement pour l’équipe. Enfin en cas de conflits, la direction a la responsabilité de distinguer les rôles de chacun et de les faire respecter.
1.3.2. Pour les enseignants
Globalement, les effets du co-enseignement sur le personnel enseignant apparaissent donc positifs. En France, peu d’études ont été réalisées sur ce sujet, et la plupart concernent principalement l’enseignement primaire et l’action de deux personnels de l’enseignement régulier (professeures et professeurs des écoles) dans le cadre du dispositif «plus de maîtres que de classes » (Toullec-Théry et Marlot, 2013; Toullec-Théry, 2017).
Les bénéfices du co-enseignement sont indéniables. Outre la diminution du ratio élèves/enseignants, l’enquête réalisée par Myriam Janin et David Couvert, de la Direction des Services Départementaux de l’Éducation nationale de Moselle, Metz, France en automne 2020,auprès de 85 professeurs de collège en Meurthe et Moselle[9] révèle que les bénéfices constatés sont supérieurs aux difficultés induites par la pratique. Les résultats indiquent que le co-enseignement aurait permis aux personnels enseignants de 1) gagner en compétence dans leur champ d’expertise, 2) diversifier leurs compétences, et 3) augmenter leur sentiment d’efficacité personnelle par les effets positifs constatés sur les élèves. A la question s’ils avaient la possibilité de revenir en arrière dans un enseignement classique (un enseignant une classe), 66% des personnes interrogées ne le feraient pas. Ces questions ont été reprises et soumises auprès des participants des actions menées en formation et confirment les bénéfices du co-enseignement, 52.4% ne reviendraient pas à un enseignement classique. ( annexes 1 et 2)
Être à deux c’est gérer et prendre des décisions communes. La charge mentale est divisée par deux, quand le binôme s’entend bien. Les enseignants peuvent participer à la gestion de la classe et de la difficulté, et créer des groupes de besoins ce qui facilite la pédagogie différenciée. Les enseignants peuvent mieux venir en aide aux élèves en difficulté et le second enseignant devient alors un appui pour mieux observer. (Nadeige Chauvot, 2019). Deux enseignantes en collège de l’Académie de Grenoble illustrent ainsi les avantages d’être à deux pour pratiquer une pédagogie différenciée [10]. D’ailleurs, les retours des enseignants observés et stagiaires au cours des actions de formation reconnaissent cette facilité dans la gestion de classe en binôme.
Grâce au co-enseignement, il en résulte une meilleure connaissance des pratiques professionnelles respectives pour le binôme. Chaque professeur alimente le cours de son champ d’expertise, apporte l'éclairage nécessaire propre à sa discipline.
En outre, il n’est pas nécessaire d’être spécialiste de l’autre discipline : chaque professeur est en position d’apporter un regard à la fois expert et candide sur les contenus travaillés et les compétences mises en œuvre comme par exemple en ETLV. La médiation trouve alors sa pleine place.[11]En tout état de cause, une mise en commun de leur expertise est nécessaire afin que le co-enseignement prenne tout son sens.
Le co-enseignement est une réponse au développement d’attitudes positives chez les enseignants qui développement un « sentiment d’auto-efficacité ; une réponse aux besoins d’apprentissage différents des élèves d’une même classe en contribuant au développement professionnel des enseignants (Moldoveanu et al.,2015). Il peut être aussi un moyen de rassurer les professeurs débutants, néo-titulaires ou contractuels dans le métier et de favoriser ainsi leur développement professionnel puisque grâce à cette pratique, son répertoire de connaissances, de postures et de gestes professionnels s’élargit.
Les bénéfices de cette pratique sont actés, mais il existe des résistances certaines à la pratique sereine et effective de cette collaboration. De quel ordre sont ces barrières ? quels sont les leviers de la réussite du co-enseignement ? Afin de répondre à ces questions, une veille informationnelle a été réalisée dans l’objectif de récolter des données qui permettront par la suite d’émettre des hypothèses et de trouver des solutions afin de répondre à mon questionnement.
2. Au-delà de la prescription institutionnelle, un recueil de données composite a été mené au travers
2.1. De deux actions de formation
2.1.1. Action de formation 1 disciplinaire : optimisation de la co- animation
Les actions de formation mises en place parallèlement à ma préparation à la certification ont permis par le biais d’échanges avec les stagiaires et de sondages d’alimenter ma réflexion. Je me suis tournée vers une méthodologie composite au travers d’immersions en classe suivis d’entretiens semi-directifs. L’ensemble des données collectées a été réalisé auprès d’un échantillon qualitatif composé essentiellement d’enseignants de disciplines générales et professionnelles, issus de l’enseignement secondaire et qui pratiquent le co-enseignement institutionnalisé.
La première action de formation, co- animée avec mon binôme actuel, professeure d’anglais, s’est déroulée le 03 février 2023 en présentiel et le 11 mai 2023 en virtuel et portait sur la manière d’optimiser la co- animation en ETLV en classe de STMG.
Le public concerné, désigné, était de 17 stagiaires, binômes composés de professeurs d’anglais et d’économie gestion intervenant exclusivement en ETLV en classe de première et terminale STMG.
L’objectif de cette formation était de comprendre les difficultés et résistances de certains professeurs face à cet enseignement et de lever les barrières éventuelles.
Un sondage a permis de faire ressortir des situations très compliquées pour certains collègues. C’est pourquoi, le contenu de cette formation a été axé sur la manière d'optimiser la co- animation en ETLV en apportant des éléments théoriques et en mettant en place des mises en situation pour favoriser les échanges de pratiques.
Cette première action de formation disciplinaire a permis d’abord de révéler des difficultés d’enseignants en réelle souffrance face à ce dispositif (effectif élèves élevé, pas de concertation, absence récurrente du binôme) et de comprendre des résistances conscientes ou non (barrage de la langue, enseignement imposé, collaboration et communication entre les binômes inexistantes…).
L’intérêt de cette formation est la mise en exergue de quelques éléments importants concernant le ressenti des collègues face à cette pratique du co-enseignement et les leviers de réussite de cette collaboration :
- la possibilité d'un démarrage en décalé des cours d’ETLV afin que les élèves aient eu leurs premiers cours de management, avant ceux d’ETLV pour avoir une introduction au cours de management. Cette proposition montre l’importance du rôle de l’institution et des chefs d’établissements avec lesquels les équipes enseignantes doivent dialoguer.
- le souhait des collègues de bénéficier d'une heure de concertation surtout pour ceux qui font partie de deux ou trois binômes différents. La banalisation d’une heure a été proposée mais ces ajustements sont du ressort des établissements qui ont des contraintes budgétaires et d’emploi du temps donc elle paraissait très compliquée à mettre en place.
- Il ressort de cette formation une situation vécue récurrente des collègues qui se retrouvent à animer le cours d'ETLV seuls alors qu'ils n’interviennent pas auprès des élèves en dehors de cette heure de co-enseignement.
- Les conditions d’enseignement sont différentes d'un établissement à un autre et c’est donc à l’enseignant de s’adapter.
- Enfin, le besoin permanent d’une nouvelle formation pour les collègues a été soulevé. Afin d'associer les autres sections technologiques dans la santé et le social (ST2S) et en hôtellerie restauration (STHR), peut être qu’une future formation commune à tous les collègues intervenant en ETLV en section technologique serait intéressante en nommant un professeur référent, chargé de relayer l’information auprès des collègues. Cette dernière proposition met en avant l’importance des formations disciplinaires et de la transmission auprès des équipes enseignantes au sein des établissements.
J’ai retenu que la posture du formateur était essentielle. Il ne doit pas se positionner en expert sachant face à un public réfractaire, désigné mais plutôt en facilitateur, en position d’écoute afin de libérer la parole et atténuer les angoisses.
2.1.2. Action de formation 2 : la co-intervention en pratique
La seconde action de formation a eu lieu le 09 février 2024, et portait sur la pratique de la co-intervention en général. Il s’agissait de montrer que cette pratique pouvait être un levier pour l'efficacité des enseignements et l'engagement des élèves.
Le public concerné était composé de 21 stagiaires volontaires. La force des participants tenait à son hétérogénéité puisqu’elle réunissait plusieurs disciplines (mathématiques, français, anglais, économie gestion) du second degré avec des enseignants de collège, lycée et post baccalauréat.
Un recueil de données a été réalisé auprès des participants (co-intervention voulue ou imposée, choix du binôme, modalités de fonctionnement du binôme pour la préparation, la co -animation et l'évaluation, bénéfices et difficultés rencontrées...) afin d'évaluer leurs besoins.
Le concept de la co-intervention et ses nuances avec le co-enseignement a été présenté ainsi que les modalités d'intervention possibles.
L’objectif était surtout d’apporter des éléments sur leur pratique et des exemples sur le croisement des disciplines ; d’envisager des ateliers pour expérimenter ces différentes modalités en fonction des activités choisies et des objectifs des séances prévues par les enseignants.
L’intérêt de cette action était aussi d’apporter des outils pour faciliter cette co-intervention (charte de fonctionnement, fiches de co- animation avant pendant et après). C’est pourquoi, la posture de formateur qu’il me semblait judicieuse d’adopter était le « lâcher prise » afin de permettre aux stagiaires de réfléchir par eux-mêmes et de construire ensemble avec l’élaboration de leurs propres règles dans le processus de la co-intervention par exemple. Je me suis positionnée en tant qu’«éclaireur » afin qu’ils parviennent à construire par eux-mêmes et valident d’un commun accord les outils à utiliser dans leur collaboration en prenant en considération tous les éléments. Par exemple, au moment de valider leurs propres exigences et tolérances, ou encore au moment de la réflexion sur les éléments de la phase d’évaluation, ils se sont positionnés par rapport aux élèves en oubliant de considérer leur binôme, preuve que la co- animation n’est pas encore ancrée dans les pratiques et que la formation peut contribuer à y remédier.
Cette action de formation m’a permis de comparer la co-intervention à des niveaux d'enseignement différents.
A l’issue de cette journée, les stagiaires ont appris à différencier la co-intervention du co-enseignement, et donc à identifier la forme de co-intervention qu’ils pratiquaient. Ainsi, certains stagiaires n’avaient pas conscience qu’ils pratiquaient une forme de co-intervention notamment les professeurs de collège qui interviennent en complément de service dans le cours d’un autre enseignant ou encore les professeurs de BTS qui travaillent en barrette, dans deux espaces différents sur le même objet d’apprentissage.
Les stagiaires ont compris que la co-intervention ou le co-enseignement ne pouvaient être évoqués sans leurs modalités de mise pratique en testant les différentes configurations de l’espace possibles (figure 5). Ils ont également intégré le fait que la co-intervention ou le co-enseignement était un processus dont la phase de préparation était primordiale car elle conditionnait la réussite de cette pratique pédagogique. Donc les stagiaires ont pu dérouler le processus en réfléchissant à leurs règles d’or communes à chaque étape avec des points communs quelle que soit leur discipline et le public d’élèves.(co-préparation, co- animation, co -évaluation).
Le co-enseignement est défini comme une pratique collaborative nécessitant une parité entre les participants et le partage des responsabilités (Beaumont, p7,2019). Or, le dispositif « Plus de Maîtres que de classes » a révélé des situations d’inégalité qui ne relèvent pas du co-enseignement ou empêchent son bon déroulement. De la même manière, les actions de formation et les immersions, ont confirmé des inégalités dans les situations des co-enseignants quant à la place occupée.
Ainsi, au cours de la seconde action de formation, une stagiaire s’est prêtée à l’exercice de l’instruction du sosie et devait expliquer à son sosie comment la remplacer dans le cadre d’une séance de co-enseignement. Cette dernière n’a pas mentionné son collègue pour la simple raison qu’il ne l’aidait pas et faisait uniquement acte de présence.
Certains professeurs ne veulent donc pas faire exister leur binôme, c’est dire la solitude des enseignants qui bien qu’ils soient deux, naviguent seuls, parce qu’ils refusent d’avoir « un meneur et un suiveur » (action formation 2)
L’inégalité permanente de responsabilité « l’un enseigne et dit à l’autre ce qu’il doit faire dans sa classe », la passivité constatée de certains enseignants : par exemple, l’un enseigne pendant que l’autre est dans la classe et attend que le temps passe » illustrent un déséquilibre des rôles qui nuit au bon fonctionnement du co-enseignement et peut être à l’origine de conflits au sein du binôme.
Le rôle du formateur est d’accompagner les réfractaires au co-enseignement en les impliquant davantage dans cette pratique pour tendre vers un partage équitable des tâches professionnelles.
2.2. Des immersions in situ
2.2.1. Observation de séances de co-enseignement
Les actions de formation ont permis de partager des expériences de co-enseignement auprès des professeurs de collège et lycée technologique et professionnel. Les immersions en lycée professionnel et BTS ont quant à elles vocation à enrichir le cadre de ma réflexion qui porte sur le co-enseignement dans le second degré et me donnent l’opportunité d’observer la place des co-enseignants.
Sur la période de novembre 2023 à mi-janvier 2024, j’ai assisté à trois séances de cours. La première immersion s’est déroulée auprès d’un public de BTS avec un binôme de pôle professionnel, composé de Sabine, expérimentée avec dix ans de pratique dans le co-enseignement et Aïcha, professeure principale qui coenseigne depuis quatre ans. Les deux autres immersions se sont déroulées auprès de collègues de lycée professionnel : Maud, professeure de sciences médico-sociales qui coenseigne avec deux collègues de matières générales : Eric, professeur de mathématiques confirmé dans la pratique du co-enseignement, et Lucy, professeure de français, débutante et contractuelle. J’ai eu l’occasion d’échanger avec tous les collègues après leur séance de cours.
Avant mon immersion, je me suis rapprochée des collègues afin d’expliquer mes objectifs et de recueillir d’abord leur ressenti par rapport à leur pratique du co- enseignement. L’accueil de la proposition a été plutôt favorable.
Puis, je me suis d’abord interrogée sur ce que j’allais observer : les activités des enseignants, leurs gestes professionnels, leurs déplacements dans la classe, les interactions entre eux et avec les élèves et enfin l’engagement des élèves dans l’activité proposée. C’est à partir de ces pistes de réflexion que j’ai construit ma propre grille d’observation. Je me suis inspirée de travaux de chercheurs qui proposent des grilles que j’ai modélisées en fonction de mes attendus la grille intitulée : « Que voyez-vous, Qu’entendez-vous ?(annexe 3) ».[12]J’ai donc choisi d’observer d’abord ce que je voyais : leurs activités en précisant le moment, l’action de l’enseignant et ses interactions avec les élèves, leurs postures telles qu’elles sont définies par Dominique Bucheton (de contrôle, d’enseignement, d’accompagnement…), leur position et évolution dans l’espace et les configurations choisies.(annexe 5)
La difficulté a été d’identifier les gestes professionnels selon la typologie de Dominique Bucheton et de repérer les interactions et micro-concertations rares entre les enseignants au moment de la co- animation.
L’intérêt de ces immersions m’a paru évident puisque le « co-enseignement c’est voir et entendre ce que fait et dit l’autre dans un contexte précis. » (Saillot, 2018), voir comment les enseignants interagissent pour favoriser une pédagogie différenciée dans leur espace.
J’ai par la suite découvert la modélisation systémique des ajustements des enseignants dans un contexte de co-enseignement, (figure 9), afin d’analyser au mieux les ajustements éventuels entre les collègues.
2.2.2. Entretiens semi-directifs
Une rencontre a été prévue avec chacun des professeurs visités de manière individuelle, après la séance afin de mener un entretien semi-directif, d’une durée de 20 à 30 minutes.
Le choix de mener des entretiens semi-directifs a été guidé par la volonté de laisser les enseignants d’abord s’exprimer librement sur plusieurs aspects du co-enseignement que j’avais prédéfinis, pour ensuite orienter l’entretien vers le sujet du mémoire autrement dit la place occupée au sein du binôme. Il m’a paru intéressant d’axer cet entretien autour des questions liées d’abord à leur ressenti puis de les diriger vers les choix pédagogiques qu’ils ont opérés pour enfin analyser leurs réponses.
J’ai d’abord fait un point sur leur expérience dans le co-enseignement, la plus-value du dispositif, puis je les ai interrogés sur l’état de leur collaboration avec leur binôme en m’attachant à dérouler l’ensemble des étapes du co-enseignement afin de connaitre leur répartition des tâches et leurs modalités de co-préparation (contenu, objectifs, activité à bâtir, mode de regroupement des élèves, assignation des rôles des enseignants et des élèves) et enfin sur leurs pratiques d’évaluation des élèves (seul, en binôme ou à tour de rôle, réflexion sur l’atteinte des objectifs, les réajustements possibles de leur séance. Grâce à ce questionnement, les difficultés par rapport à ce dispositif ont émergé (manque de temps de concertation, déséquilibre dans la préparation de la séance).
Alors que les immersions ont confirmé des déséquilibres dans les places et rôles occupés par les collègues au moment de la co- animation, les actions de formation ont libéré la parole des stagiaires qui ont exprimé leur solitude ou leur difficulté à communiquer avec leur binôme. On peut donc émettre l’hypothèse de barrières ou résistances qui expliqueraient ces différences de places et rôles au sein du binôme.
Voici à titre d’exemple les résultats de l’entretien qui a suivi ma première Immersion. Pour rappel le profil des deux professeurs présente des similitudes. En effet, les enseignantes interviennent dans des matières professionnelles et ont un volume horaire important avec les élèves en raison du diplôme préparé ou de leur statut. Aicha intervient dans un pôle professionnel : gestion de projet, son volume d’heures avec la même classe est important (bloc de 4heures, plus 2h).Sabine quant à elle intervient dans plusieurs pôles CEJM (culture économique juridique et managériale et OPA (opérations et processus administratifs). Son volume d’heures peut atteindre 6 heures sur une seule journée.
L’entretien avec chacune des collègues a révélé des temps de concertation informels, très courts d’une durée de 10 minutes avant la séance où elles ne réfléchissent pas toujours à la répartition des rôles. Quand je les interroge sur leur répartition des rôles pendant l’animation, Aicha me dit « je pilote et ma collègue arrive en renfort et apporte sa touche OPA sur les dates butoirs des missions et tâches à réaliser. »Elle pense que sa collègue et elle sont complémentaires. Cette dernière remarque montre l’interdépendance des enseignants dans cette pratique pédagogique.
A la question, quels sont selon elles les critères de réussite d’une co- animation, elles répondent :
« il ne faut pas se marcher l’une sur l’autre. Je ne veux pas que l’on marche sur mon territoire ». Ce terme très fort marque bien la volonté de chaque enseignant de délimiter son espace personnel à l’intérieur de ce duo de travail.
Enfin, l’importance d’une culture commune semble essentielle afin d’instaurer une confiance mutuelle et optimiser le fonctionnement du binôme. « C’est important d’être toujours sur la même longueur d’ondes, ça se passe bien si on partage les mêmes valeurs ».
En conclusion : cette immersion m’a éclairée sur plusieurs aspects : la marge de manœuvre des enseignants est parfois limitée quant au choix de configuration de salle qui ne permet pas une libre circulation et une grande flexibilité tant pour les élèves que les professeurs.
Il paraît difficile pour les co-enseignants de trouver un moment de concertation avant la séance. En outre, même si les interactions sont limitées entre les enseignants au moment de la séance, une bonne entente du binôme s’appuie sur des valeurs communes.
Enfin, les conflits interviennent essentiellement avec les professeurs débutants qui ne comprennent pas leur place et leur rôle. Donc, le membre le plus expérimenté du binôme finalement joue inconsciemment le rôle d’accompagnateur et de formateur dans l’appropriation du dispositif.
3. Emergence de barrières et résistances des enseignants, qui pourraient expliquer les différences de places au sein du binôme
3.1. Les barrières conscientes
3.1.1. Le co-enseignement : une pratique perçue comme contraignante
Les actions de formation ont confirmé la méconnaissance du concept de co-enseignement par les stagiaires, malgré eux, puisque c’est une pratique imposée. Ils ne savent pas définir cette pratique et ne maîtrisent pas ses nuances avec la co-intervention, son processus (figure 3) et ses modalités possibles de mise œuvre, (figure 5).
La mise en place du co-enseignement est source de contraintes. En effet, les effectifs sont parfois lourds, classe à 36 non dédoublée (33 % des personnes sondées ont un effectif supérieur à 30 (résultats sondage 2, 37.5% pour le premier sondage). Les enseignants qui doivent s’adapter malgré eux et ont le sentiment de ne pas être écoutés. On leur impose un ou plusieurs binômes différents, sur des plages horaires définies ce qui ne motive pas les intéressés(82.5% des enseignants travaillent avec des binômes différents, d’une année sur l’autre. (annexe 1 : sondage action de formation 1)
Le co-enseignement est une pratique chronophage, du moins au début de la relation car il nécessite un temps de concertation que les enseignants n’ont pas toujours. Les emplois du temps ne permettent pas forcément de dégager un créneau commun et l’institution n’a pas les moyens en dotation horaire de dégager du temps. Ce manque de concertation pénalise les enseignants, 71.4% des sondés disent préparer la séance seuls. (annexe 2 : action de formation 2)
Cette concertation préalable demande du temps au début de la relation mais il ne faut pas pour autant négliger les rencontres informelles (entre deux cours, à la pause méridienne, par mail, par sms…) qui entrent dans le temps consacré à la préparation.
Le barrage ou l’appropriation de la discipline de son binôme peut-être un frein surtout pour l’enseignement en langue étrangère alors qu’on ne demande pas à l’autre d’être expert dans la matière de son binôme. Il serait peut-être préférable de s’acculturer un minimum dans l’autre discipline sans pour autant devenir expert. Cette acculturation peut passer par une immersion du professeur dans le cours de son binôme. Ainsi, au cours de la première action de formation, une professeure d’anglais explique qu’elle participe aux cours de son collègue dans sa spécialité pour se familiariser avec les contenus. De la même façon, au cours d’un entretien, la professeure de sciences médico-sociales qui abordait en co-enseignement la thématique des maladies de l’œil avec ses élèves, a demandé à son binôme professeur de physique de lui donner un cours sur la vision des couleurs par l’œil.
3.1.2. Une pratique qui empêche l’enseignant d’être seul maître à bord de sa classe.
La tâche de l’enseignant se complexifie et il devient de plus en plus difficile pour lui de la réaliser de façon isolée(…) il est ainsi appelé à travailler avec un personnel de plus en plus diversifié pour mieux répondre aux besoins des élèves.[13]
Le co-enseignement se heurte ainsi à la pratique traditionnelle de l’enseignement ou le professeur est solitaire. Longtemps seul dans sa salle de classe, le professeur ne l’est plus avec la présence d’un autre enseignant. Deux pensées émergent pour qualifier le statut passé du professeur avant la mise en place de cette pratique et rendent la solitude du « professeur ambigüe » (Philippe Perrenoud, 1995). La première vision est celle d’un enseignant confiant qui mène la classe en étant seul maître à bord ». La seconde traduit un malaise de l’enseignant qui se sent seul dans sa salle de classe, face à son groupe d’élèves. La pratique du co-enseignement tend alors à « briser l’isolement du professeur ». (Rachel Harent, 2023)
Avec le co-enseignement, le professeur co- anime avec un binôme qu’il n’a pas toujours choisi. Cette pratique professionnelle est ainsi symboliquement comparée à un « mariage pédagogique ou naturel » (Koehler Evans,2006), (Nancy Granger, 2019). Comme tout mariage, il y a le risque de la séparation, mais aussi la chance de s’épanouir professionnellement en apprenant ensemble ». (Rachel Harent,2023, p.145)
Certains pensent qu’enseigner à deux c’est mieux, d’autres en revanche pensent que c’est une contrainte.
Au-delà de la prise de conscience de facteurs qui seraient à l’origine du disfonctionnement du « couple de travail » que forme les co-enseignants, d’autres résistances moins visibles expliqueraient peut-être le déséquilibre des rôles.
3.2. Les résistances inconscientes
3.2.1. La peur du regard de l’autre et du changement
« Peur, moi, vous voulez rire ? De quoi aurait-on peur ?Enseigner, c’est souvent être renvoyé à soi-même, à ses propres limites, incertitudes ou crises identitaires ; c’est être jugé par ses collègues et sa hiérarchie. » (Philippe Perrenoud,1995).Les propos de cet auteur montrent bien à quel point le co-enseignement bouleverse les schémas classiques, l’enseignant n’est plus seul et ressent peut-être la peur du jugement de l’autre collègue. Philippe Perrenoud émet l’hypothèse qu’en vantant les mérites de la solitude, les enseignants cachent le refus de se confronter aux autres, la crainte de devoir s’engager davantage dans le travail, voire d’être poussé à changer sa pratique sous leur influence. Cette situation s’expliquerait peut-être par les habitudes ancrées chez l’enseignant et une certaine appréhension à les changer.
Cette peur de l’enseignant est profondément humaine et nécessite d’être régulée. Elle trouverait son origine dans le refus du changement, comportement propre à l’être humain qui, sorti de sa zone de confort opère alors une résistance naturelle qui peut dans le cas du co-enseignement conduire à des comportements attentistes voire passifs de certains binômes Pour vaincre la peur du changement, il faudrait s’interroger sur l’origine des résistances qui sont liées, pour une grande part, à l'incertitude, au manque de précisions, d'information, d'explications, qu'on pourrait d'ailleurs associer à un manque de considération. (Autissier et Moutot, 2003)
Les travaux d’Elisabeth Kübler Ross sur l’acceptation de situations difficiles telle que la maladie proposent une courbe appelée courbe d’apprentissage du changement, courbe d’engagement ou encore courbe de deuil. Cette dernière illustre le cheminement perceptif d’un changement chez une personne et donne des clés à ceux qui le gèrent. Il passe par différents états au cours desquels il fait à la fois le deuil de l’existant et l’expérimentation du gain futur…(figure 8). En qualité de formateur, il est primordial de comprendre et d’accompagner cette résistance au changement. En reprenant la courbe d’Elisabeth Kübler, le formateur se situerait en phase d’exploration car au moment des actions de formation, les enseignants sont déjà impliqués dans le dispositif de co-enseignement.
« Les résistances au changement s'observent dans les groupes des acteurs qui ne sont pas concepteurs du projet ». Les auteurs notent qu'une attitude courante de manifestation de la résistance est la passivité, le retrait vis-à-vis de l'action, l'attentisme. C’est le comportement adopté par certains binômes notamment en ETLV, qui ne maîtrisent pas la langue anglaise et ne comprennent pas l’intérêt de la pratique du co-enseignement. C’est pourquoi expliquer le changement, ses objectifs ses bénéfices et écouter les résistances des stagiaires est une démarche qui peut entrer dans la compétence d’accompagnement du formateur.
La peur de l’autre et du changement peut conduire à des situations conflictuelles pendant la co- animation et à des situations où l’autorité de l’un est mise à mal par l’autre. Ainsi, les «contre consignes» sont l’exemple marquant qui soulève la mésentente des collègues et peuvent mettre à mal l’autorité d’un collègue et lui faire perdre toute crédibilité.
3.2.2. Le statut du professeur influencerait la place du binôme
Le jeune professeur, débutant a tendance du moins au départ à considérer le co- enseignement comme une aide partant de l’idée « qu’être à deux c’est deux fois mieux » mais il se rend compte en la pratiquant que ce n’est pas « deux fois plus facile ». Le professeur qui a plus d’ancienneté peut la considérer comme une contrainte, quand il doit prendre en charge seul la préparation de la séance.
Sabine m’explique avoir eu « une expérience négative avec un autre enseignant qui débutait dans la carrière où il a eu du mal à prendre sa place après une première phase d’observation. Il se reposait trop sur moi pour le contenu ou la gestion de classe. Sa passivité nuisant à apporter de la plus-value à l’enseignement (il préparait ses cours pendant les ateliers pro). Ce qui a conduit à un manque de « crédibilité » auprès des étudiants qui ne le sollicitaient que très peu et en ce qui me concerne un épuisement » physique et mental à prendre en charge la totalité de l’enseignement. »
Quand Maud intervient avec son binôme Lucy, c’est encore elle qui donne les consignes, répartit les groupes dans la salle et apporte son aide à tour de rôle aux élèves. Elle a préparé seule la séance ce qui se ressent au moment de la co- animation puisque Lucy découvre le document de travail des élèves et peine à répondre aux sollicitations de ces derniers. Maud se retrouve débordée. Au moment de l’entretien, Lucy m’explique que Maud est experte dans son domaine donc elle a choisi de gérer la forme et Maud le fond.
« Dans une autre situation pédagogique, un enseignant contractuel en co-enseignement. ne s’impliquait pas et laissait son binôme gérer la totalité de l’enseignement. Il n’y avait pas de co- animation, il faisait juste acte de présence et n’était d’aucun soutien ou appui dans la gestion de la classe tant pédagogiquement que physiquement. Malgré une réunion de travail, rien n’a évolué. Le collègue était en souffrance alors qu’une meilleure intervention de l’autre enseignant aura changé du tout au tout la physionomie du cours car les élèves étaient réceptifs et il aurait été possible d’aller plus loin avec eux. »
Accompagner les novices paraît nécessaire et former les enseignants confirmés au co-enseignement afin qu’ils jouent le rôle de tuteur serait une première solution possible pour lever les freins et faciliter le co-développement professionnel.
Par ailleurs, la présence devant élèves du professeur en dehors des heures de co-enseignement aurait une incidence sur la légitimité de l’enseignant en situation de co-enseignement. Ainsi, le professeur principal ou l’enseignant qui a un volume conséquent et qui retrouve plusieurs fois dans la semaine les élèves est à son avantage dans le co-enseignement à l’inverse du professeur qui n’a les élèves qu’une heure par semaine et qui plus est, enseigne dans une discipline ou les représentations sont négatives et l’appétence des élèves moindre. On peut supposer que plus le volume horaire est important, plus la connaissance des élèves et de leurs difficultés par l’enseignant est facilitée alors que la rareté du nombre d’heures ne permettrait pas de fédérer et de « laisser son empreinte, ni même de faire adhérer les élèves à sa propre méthode », dixit une enseignante qui pratique le co-enseignement. En effet, l’enseignant peut avoir le sentiment que les élèves ne lui font pas confiance parce qu’il lui faut du temps pour instaurer ce climat, le temps que les élèves apprennent à le connaître.
Pour atténuer ce déséquilibre et accorder une certaine reconnaissance au binôme qui ne voit les élèves qu’une heure par semaine, peut-être serait-il intéressant de le faire participer aux échanges avec les parents notamment grâce aux rencontres parents professeurs ? De lui donner sa place, dès l’accueil des élèves et dans les échanges avec les élèves. Par exemple, cette légitimité peut passer par l’envoi systématique des travaux réalisés par les élèves, sur l’espace numérique de travail aux deux enseignants.
Ces différences liées au statut du professeur, sa discipline, son nombre d’heures effectives avec les élèves questionnent et on se peut se demander si au final en fonction de ces particularités, un professeur aurait plus de « place » donc plus de légitimité par rapport à son binôme.
Eric, qui co- anime avec Maud, se dit frustré. Ce dernier explique qu’il n’arrive pas à s’imposer parce qu’il ne voit les élèves qu’une heure par semaine. A l’inverse, Maud s’entend bien avec Eric et pense qu’ils forment un tandem, parce qu’ils fonctionnent bien ensemble. Cependant, elle explique qu’elle a l’impression de prendre parfois trop de place dans le binôme. En effet, au moment de mon immersion, je me rends compte que la prise de parole de Maud est prédominante. Cette dernière accompagne les élèves sur toutes les activités, intervient la première pour donner les consignes de travail, et faire le bilan des activités proposées. Sur une séance d’une heure, Maud mène quatre activités sur cinq. Au moment d’une restitution des élèves à l’oral, force est de constater la position debout d’Eric, devant la porte alors que Maud est assise au fond de la salle et évalue seule les élèves sur sa grille d’évaluation.
Sabine évoque quant à elle son expérience dans le co-enseignement en utilisant le terme de « territoire ». Elles se sont répartis les rôles avec sa binôme en fonction des attendus de chaque pôle professionnel. Lorsqu’ Aïcha fait un premier bilan sur les travaux de projets des étudiants, Sabine étaye les propos de sa collègue et apporte des précisions quant au respect des dates butoirs. Elles gèrent toutes les deux à tour de rôle les problèmes de bruit, de comportement. Elles se sont réparties les tâches : pendant que Sabine reçoit individuellement les étudiants, Aïcha passe auprès de chaque groupe, mutualise et croise les données des projets avec les groupes.
Ces exemples de pratique du co-enseignement illustrent la prédominance du rôle de certains collègues qui ressentent qu’ils prennent trop de place et s’interrogent sur la manière de s’effacer pour laisser plus de place à l’autre. C’est pourquoi, Il serait intéressant de réfléchir à des solutions qui permettraient au binôme de trouver sa place dans la pratique du co-enseignement.
4. Solutions pour trouver sa place au sein du binôme.
4.1. Entrer dans la confrontation ou se faire confiance
4.1.1. De la nécessité du conflit
La situation de co-enseignement engendre des conflits (inconfort professionnel, improvisation permanente, conflits interpersonnels).
Le conflit ou la « dispute professionnelle » (Yves Clot, 2014) est inéluctable dans le travail en équipe. C’est un conflit de normes (fonctionnelles, sociales, et éthiques (Canguilhem, 1966).
Selon Mary Parker Follet (1868-1933), le conflit doit être exploité et non évité. Si conflit il y a, il ne faut pas chercher à l’éradiquer par tous les moyens. Il doit être dépassé par une approche collaborative, plutôt que d’aboutir à la domination d’un groupe ou d’un individu sur les autres. Dans cette approche, le conflit est constructif car il permet de s’améliorer. C’est une condition du développement professionnel, on se développe les uns avec les autres.
Que l’on soit partisan ou pas du conflit, il me semble que l’institution peut jouer un rôle pour atténuer les tensions. Celle-ci peut favoriser la gestion de conflits, le travail effectif en équipe, la centralisation et la dynamisation de ce co-enseignement en nommant un référent ou médiateur par exemple. C’est une mission qui pourrait incomber au coordonnateur de discipline ou au directeur délégué à la formation professionnelle et technologique (DDFPT) dans un lycée.
Le formateur pourrait accompagner les stagiaires dans la résolution de conflits en identifiant le type de conflit pour mieux le prévenir. En l’occurrence, il peut s’agir ici d’un conflit interpersonnel généré par des divergences d’opinion sur des choix pédagogiques ou des interférences dans les discours de chacun par rapport aux élèves.
4.1.2. A une confiance mutuelle au sein du binôme
« Notre binôme fonctionne bien car nous avons les mêmes valeurs. » J’ai à plusieurs reprises entendu ces propos de la part des enseignants observés. Ainsi, lorsque Sabine évoque un retour d’expérience dans la pratique du co-enseignement, celle-ci insiste sur le fait que « tout s’est bien passé car nous avions la même vision du cours et de la gestion de classe. » La confiance mutuelle peut entrer dans ce champ de valeur. Elle doit être présente au sein d’une équipe pour pouvoir exprimer librement son opinion sans craindre le jugement ou la dépréciation (Beaumont,p.8, 2019). Or, c’est plutôt un climat de méfiance qui s’installe au début de la relation au sein du binôme On peut en déduire que la première étape nécessaire au bon fonctionnement du duo de travail est la connaissance de son binôme, c’est-à-dire de ses forces et faiblesses et la levée des résistances inconscientes.
Dans le cadre de la formation, le formateur a son rôle à jouer en adoptant une posture d’écoute et en proposant des exercices où les stagiaires peuvent confronter leurs opinions. J’ai invité les participants de la seconde action de formation à réfléchir sur leurs propres exigences et tolérances dans le cadre de leur pratique du co-enseignement. Leurs premières réflexions ont étonnamment porté sur les exigences par rapport aux élèves. Il a fallu les guider pour qu’ils transposent cet exercice en réfléchissant à ce qu’ils attendaient de leur binôme. Les stagiaires ont d’abord réfléchi individuellement puis ont comparé leurs idées avec leurs pairs. Nous avons ensuite proposé la rédaction d’une synthèse commune pour repérer les items de discussion que nous avons mutualisé sur un mur collaboratif (annexe 6). Si les règles sont définies avant même de commencer la pratique du co-enseignement, celle- ci aura plus de chance de fonctionner. C’est pourquoi, une charte de fonctionnement modifiable a été suggérée aux stagiaires.
Cette charte et ce partage de nos exigences et tolérances vis-à-vis des élèves et deson binôme permettent d’éviter les contre-consignes notamment dans la gestion de classe et des comportements des élèves.
Cette connaissance du binôme passe par un état des lieux par les co-enseignants de leur niveau de collaboration et d’interdépendance puisque le co-enseignement est une pratique collaborative qui induit une interdépendance entre les enseignants. Des outils existent et permettent un positionnement du binôme. (figure 4)
Enfin, si cela est possible, la pérennisation du binôme sur une durée d’au moins trois ans en me basant sur mon expérience personnelle peut-être intéressante à proposer pour renforcer la confiance mutuelle des enseignants. En effet, la première année, on ne connaît pas assez son binôme, la deuxième année est plus constructive et la troisième année, on ose innover ou changer ses habitudes.
4.2. Former les personnels à la co-préparation
La phase de préparation entre dans le processus de co-enseignement que nous avons défini précédemment. Les termes de co-préparation, co-instruction ou de co-planification sont utilisés pour évoquer cette phase et permettent d’apprécier son contenu. Le préfixe « co », qui signifie « avec » indique bien qu’au cours de cette étape, le binôme décide ensemble, des rôles de chacun et des responsabilités pour la gestion du groupe. (Hang et Rabren, 2009 ; Benoit et Angelucci,2011 cité par France Dubé et al.p11,2019)
La phase de préparation nécessite du temps dont les enseignants ne disposent pas nécessairement. Les rencontres informelles ne suffisent parfois pas pour travailler ensemble. C’est pourquoi, d’autres alternatives existent afin de permettre aux enseignants de collaborer. Les outils numériques, les plateformes de partage et les outils de mutualisation sont des ressources intéressantes pour permettre aux enseignants d’échanger et de construire ensemble, à l’échelle d’un binôme, d’un établissement voire de l’académie. La Digitale permet de partager des ressources communes via l’outil Digipad que j’ai utilisé au cours d’une action de formation. Il en est de même pour la suite d’applications : appseducation qui propose un ensemble d’applications qui permettent de travailler ensemble, de partager et stocker des ressources de manière sécurisée.
La première étape du processus de co-enseignement est un moment décisif pour le binôme pour répartir les rôles et le positionnement de chacun (qui anime, qui présente, qui aide les élèves en difficultés), pour se fixer un objectif commun et construire des supports. C’est dans cette phase que le binôme ajuste l’organisation de sa séance en fonction des besoins des élèves en choisissant une ou plusieurs configurations et en croisant ses disciplines.
4.2.1. Configurations de l’espace possibles
Marilyn Friend and Lynne Cook(2013)présentent le co-enseignement comme une collaboration conçue pour répondre aux besoins des élèves selon diverses modalités et configurations au départ au nombre de six puis élargies à 7(Friend, cook, Hurley-Chamberlain et Shamberger, 2010 Tremblay, 2012, Dubé cité par France Dubé p4,2019, complété par Goigoux et TOULLEC Théry, 2012), (figure 5).
La modalité le plus souvent choisie par les enseignants est « l’un enseigne et l’autre observe ». Elle correspond à une modalité basique que les enseignants utilisent quand ils n’ont pas été formés à la pluralité des configurations possibles. Ce choix s’apparente parfois à de la co- présence et non pas du co- enseignement ».
Le choix de la configuration peut dépendre du portrait de la classe, des besoins des élèves, des objectifs d’apprentissage, des situations d’enseignement. Pour un travail de groupe, la configuration en îlots sera préférée. (France Dubé et al. p.10, 2019)
« Il n’y a pas de bonne ou mauvaise configuration, mais chacune, si elle présente des avantages essentiels, présente également des risques. Il convient donc de varier ces configurations. »[14](figure 6)
Il peut être intéressant de tester de nouvelles configurations et se mettre en danger (prendre des risques), varier ces configurations tout au long de la séance, ne pas rester toujours avec le même groupe d’élèves) « plusieurs configurations peuvent être planifiées et mises en place au cours d’une même situation d’enseignement-apprentissage co- enseignée(France Dubé et al.2019). Ainsi, travailler en atelier parallèle, ou chaque professeur prend en charge un groupe au sein du même espace classe, facilite l’échange entre les élèves, leur autonomie et leurs apprentissages dans le cadre notamment de la démarche projet. Cette configuration permet aussi pour les professeurs d’équilibrer leur rôle en situation de co-enseignement et de développer leurs interactions. [15]
Le choix de la bonne configuration paraît donc essentiel afin de ne pas empiéter sur la place de l’autre « se gêner le moins possible ».
4.2.2. Croisement des disciplines
Apprendre à croiser les disciplines a un double intérêt : celui de décloisonner les enseignements et les notions et de concrétiser certaines disciplines abstraites[16] pour les élèves comme les mathématiques par exemple. Pour autant, croiser ne veut pas dire juxtaposer mais co- construire. Par exemple, dans le cadre de la recherche de stage, le professeur de français qui corrige les fautes d’orthographe ou d’expression d’une lettre de motivation ou d’un CV ne croise pas les disciplines avec son collègue de spécialité. En revanche, s’il s’attarde sur l’identité professionnelle de l’élève, la manière de valoriser ses qualités et défauts, il devient complémentaire avec son binôme.
Un constat récurrent revient souvent dans les échanges quand on questionne les professeurs sur leur façon de croiser les disciplines : chaque enseignant traite sa matière à sa façon, sans tenir compte de la complémentarité qu’elle peut avoir avec d’autre. Pour comprendre ce décloisonnement de disciplines, Anne Pedron, dans un entretien sur la co-intervention, un modèle de cohésion (2019),explique comment à titre expérimental, les SVT peuvent être croisés avec la philosophie lorsqu’il s’agit d’évoquer le thème de la mort tant d’un point de vue clinique que d’un point de vue philosophique.
Le cours de co-enseignement en ETLV permet quant à lui de travailler un contenu du programme de spécialité à travers le prisme de l’aire culturelle de la langue vivante, et ne peut se substituer au traitement du programme de spécialité. Les supports sont donc le programme de langue vivante et celui de la discipline technologique concernée. L’entrée se fait par le programme de langue vivante. De ce fait, les outils linguistiques seront adaptés à la série, comme l’utilisation d’un lexique spécifique, la maitrise des temps, les connecteurs logiques, ou encore la visée du discours, et surtout la construction de compétences visant à une meilleure compréhension et un renforcement de l’expression.
Pour rendre les mathématiques plus cohérentes par exemple pour les élèves, Philippe Ceschin, professeur référent RAR en collège dans l’Académie de Créteil explique dans le cadre de l’étude de la démarche projet, dans un article intitulé « Monsieur, à quoi ça sert les mathématiques » qu’il faut dresser des passerelles entre les mathématiques et les autres matières. Il est convaincu qu’il faut décloisonner de l’extérieur, évoquant ainsi le monde professionnel en prenant l’exemple d’un menuisier qui, pour construire un escalier utilise les mêmes instruments qu’un collégien (règle, compas, équerre) ou un entraîneur sportif qui utilise les statistiques pour mesurer les performances de ses sportifs.[17]
On comprend mieux l’intérêt de croiser des disciplines technologiques et professionnelles avec des matières générales, pour rendre plus visibles les matières générales et compréhensibles les matières professionnelles inscrites dans un contexte professionnel précis.
La première action de formation disciplinaire a permis d’apporter des exemples concrets de croisement de discipline notamment en ETLV. La seconde, a permis de réfléchir à une méthodologie commune possible et d’échanger avec les collègues qui nous ont apporté des exemples de pratiques. Ainsi au collège, Les professeurs d’anglais et de mathématiques ont croisé leurs disciplines en partant de la création d’un pub anglais. Les élèves ont ainsi traduit des recettes en anglais et se sont appropriés les mathématiques par le calcul des mesures pour les cocktails et du prix des menus avec la TVA en anglais.
La demande des collègues sur cette thématique est certaine. La seconde formation a été l’occasion de présenter le croisement que de manière générale. Il faudrait des formations disciplinaires et par degré à l’image du lycée professionnel pour monter et travailler sur des exemples concrets de croisement de disciplines.
4.3. initiation aux autres étapes du processus de co- enseignement
4.3.1. La co- animation : s’observer, s’écouter, pour s’ajuster réciproquement
Dans le contexte du co-enseignement, les ajustements de l’enseignant ne sont plus uniquement focalisés sur les situations pédagogiques et didactiques dont les élèves sont les acteurs centraux, mais des auteurs (Eric Saillot, Séverine Malmaison,2015) ont émis l’hypothèse qu’ils sont également adressés vers l’autre enseignant. Ainsi, en phase de co- animation, on observe les gestes professionnels de son binôme envers les élèves et on les ajuste. La notion d’ajustement est définie « comme la manière dont l’agir langagier et corporel de l’enseignant se règle sur la situation spécifique de la classe. (Bucheton 2009 page 67).
Eric Saillot et Séverine Malmaison partent du postulat que l’enseignant dirige ses actions en fonction de l’autre (Multi-agenda de Bucheton fait avec Soulé en 2009 page 32). Ils ont cherché à comprendre ce que pense, ce que dit, ce que fait, ce qu’observe ou ce qu’écoute l’un détermine les actions de l’autre. (figure 9)
Ils concluent sur l’intérêt des ajustements réciproques entre les enseignants (maintien d’un meilleur climat de classe et temps de concentration plus important des élèves).
Ces gestes dépendent « des logiques d’arrière-plan de l’enseignant » (ses valeurs, son rapport à la prescription institutionnelle, son expérience professionnelle, sa conception de l’apprentissage, son identité professionnelle.[18]
4.3.2. La co-évaluation
Cette dernière étape est une phase qui permet de faire le bilan d’une séance vécue à deux.
Concrètement, les enseignants pourraient établir un bilan des progressions des élèves mais aussi s’interroger sur les apports de cette expérience pour eux et la classe. Ils pourraient se questionner sur ce qui n’a pas fonctionné, pourquoi et comment poursuivre ce travail.
Au cours de la seconde formation, les stagiaires ont réfléchi à leurs propres « règles d’or » de chacune des phases du processus du co-enseignement. Au moment de la co-évaluation, le rôle du formateur a été de guider les stagiaires pour élargir leur champ de l’évaluation car il se positionnaient surtout par rapport à l’élève et non pas par rapport à leur binôme. La phase d’évaluation a permis encore de révéler le fait que les stagiaires ont du mal à se positionner en tant que duo de travail et reconnaître la présence de leur binôme
Il serait intéressant d’aller plus loin et de proposer la construction d’une grille d’autoévaluation que chacun remplirait individuellement puis, qu’il confronterait à son binôme et de voir dans le temps, à l’aide d’un curseur, l’évolution de l’appréciation de chacun par rapport à des critères communs. (engagement des élèves dans l’activité, dynamisation du public, fonctionnement et fluidité du binôme….)
Conclusion et perspectives
A travers ce mémoire, j’ai appris à mieux cerner les différences entre la co-intervention et le co-enseignement et me rendre compte de la richesse de la littérature sur ce thème qui ne reste pas figée. Cette réflexion d’abord concentrée sur le premier degré, reste à développer pour le second degré. C’est dire la complexité de cette pratique pédagogique qui a démontré ses bénéfices auprès des élèves et des enseignants. Ces derniers nous l’avons vu peinent parfois à se faire une place dans ce « duo » en raison de barrières conscientes liées au statut de l’enseignant et de résistances parfois inconscientes notamment la peur.
Pour trouver sa place dans cette pratique imposée, le binôme doit d’abord apprendre à se connaître et ne pas hésiter à confronter ses opinions, C’est dans cette phase que le formateur a son rôle à jouer en proposant la construction d’outils et des jeux de rôle pour apaiser les tensions. La phase de préparation commune, un moment qui peut-être devrait être régulier est difficile à provoquer en raison des contraintes d’emploi du temps des enseignants. Elle est pourtant le socle de la réussite de cette pratique car elle permet de clarifier les rôles entre le binôme et d’instaurer une confiance mutuelle. Le co-enseignement ne se pratique pas sans réfléchir aux configurations possibles. Il permet d’initier de nouvelles modalités de travail qui permettent d’équilibrer les rôles et la place de chacun. Le co-enseignement réunit deux experts dans deux matières différentes qui ne doivent pas hésiter à se former mutuellement pour mieux croiser leurs disciplines.
La formation est sans doute un levier important pour la réussite de cette pratique. Elle est l’occasion de mutualiser les ressources à une échelle académique et de partager des expériences pour construire des outils qui permettront aux enseignants de s’armer et de se rassurer.
Si je devais faire une analyse réflexive quant à mes choix méthodologiques de récolte de données, j’aurais sans doute procédé différemment. Ainsi, le temps pour intégrer des connaissances théoriques m’a manqué, notamment sur les ajustements réciproques et les gestes professionnels de l’agir enseignant. Afin de mieux me rendre compte des interactions et ajustements entre les collègues, j’aurai pu enregistrer des séances avec l’accord des professeurs et faire des entretiens de confrontation croisés. Par ailleurs, mes immersions ont été ponctuelles dans un contexte précis à une période donnée. J’aurai peut-être dû limiter le nombre d’immersions et me concentrer sur un binôme sur une période continue afin d’affiner mon analyse quant à leurs gestes et interactions.
Pour mes sondages, il aurait été intéressant d’exploiter d’une autre manière les réponses aux questions posées en réalisant des tris croisés.
Si je devais qualifier mon ressenti à l’issue de cette expérience de rédaction de ce mémoire professionnel, je la qualifierais de «dispersion positive» face à la richesse des écrits et de la littérature aboutie sur cette thématique. A ma grande surprise, au fur et à mesure que je mûrissais ma réflexion sur le co-enseignement, je retrouvais des articles scientifiques qui avaient envisagé de nouvelles hypothèses et solutions ce qui signifie que les réflexions et expérimentations autour du co-enseignement ne sont pas figées (exemple : le co enseignement, un levier pour la construction de l’identité professionnelle de l’enseignant, P. Tremblay, N. Granger, 2022).
En outre, je souhaiterai dans un avenir proche, m’appuyer sur le dispositif Erasmus sur la mobilité des enseignants afin de partir dans les pays nordiques en immersion pour découvrir la pratique du co-enseignement et enrichir ma réflexion sur cette thématique.
Enfin, la création d’outils pour armer les novices est un vecteur pour rassurer dans la pratique du co-enseignement, mais il est difficile de mutualiser les ressources. Mon souhait pour l’avenir serait de former et mettre en place une communauté de pratiques dans le but d’insuffler des échanges, de partager des expériences pour construire ensemble.
Bibliographie et sitographie
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Dominique Bucheton, Posture et gestes du conseil en formation conférence, novembre 2016
http://blogs16.ac-poitiers.fr/ancp16/files/2017/04/ANCP16_DBucheton_presentation_mars2017.pdf
Nadeige Chauvot, intervention sur la co-intervention, une pratique au service des élèves à besoins éducatifs particuliers 30/09/2019 enquête FNAME points positifs de cette pratique cadre de référence enseignant spécialisé auprès d’élèves en difficulté.
Yves Clot, réhabiliter la dispute professionnelle, séminaire Economie et sens, séance du 5 juin 2013, compte rendu rédigé par Pascal Lefevre, Les amis de l’Ecole de Paris.
France Dubé, France, le centre de transfert pour la réussite éducative du Québec CTREQ Dufour, Marie-Jocya Paviel, Université du Québec à Montréal. Quelques pistes pour expérimenter le co-enseignement en classe,2019 www.adel.uqam.ca
Marylin Friend, Interactions, collaboration skills for school professionals (editions Pearson2007, 2013 and co-teach ! Edition PEARSON 2012
Nancy Granger, Véronique Bernard. le co-enseignement : un dispositif favorable à la mise en œuvre de l’éducation inclusive, Université de sherbrooke,2019
Rachel Harent, le co- enseignement en pratique, édition Retz, cahiers pédagogiques,mars 2023
Nancy Granger et Philippe Tremblay. Effets du co-enseignement sur le développement de l’identité professionnelle des enseignants du secondaireN65 2022 les cahiers du CERFEE
https://doi.org/10.4000/edso.20603
Myriam Janin et David Couvert. Le co-enseignement : bénéfices, limites et importance de la formation. Un article de la revue Éducation et francophonie Volume 48, numéro 2, automne 2020, p. 200–219. Regards croisés sur le co- enseignement en francophonie
Gilles Mazard, Catherine Rothenburger, Construire des situations interdisciplinaires, guide méthodologique, centre expérimentation pédagogique de Florac, ministère de l’agriculture
https://documents.cdrflorac.fr/Mazard_ConstruireSituationsDisciplinaires.pdf
Françoise Morel, Dominique Bucheton, Brigitte Carayon, Hélène Faucanié, Sandrine Laux Dans Le français aujourd'hui 2015/1 (n° 188), pages 65 à 77, Décrire les gestes professionnels pour comprendre des pratiques efficientes, https://www.cairn.info/revue-le-francais-aujourd-hui-2015-1-page-65.htm
Marc Mousli 2005/, n4 Éloge du conflit. Mary Parker Follett et le conflit constructif pages 21 à 33 Éloge du conflit. Mary Parker Follett et le conflit constructif | Cairn.info
Anne Pédron, entretien sur la co-intervention, un modèle de cohésion de classe – Interdisciplinarité,2019 - Réseau Canopé https://www.reseau-canope.fr/nouveaux-programmes/magazine/interdisciplinarite/la-co-intervention-un-modele-de-cohesion-de-classe.html
Philippe Perrenoud, Dix non- dits ou la face cachée du métier Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation Université de Genève,1995. https://www.unige.ch/fapse/SSE/teachers/perrenoud/php_main/php_1995/1995_04.html
Amigues René, Espinassy Laurence, Félix Christine et Saujat Frédéric Aix Marseille université, ADEF-UMP-P3, Equipe ERGAPE La Co intervention : un nouveau milieu de travail au service de l’efficacité et de l’équité 2007, 2008.
Éric Saillot, Séverine Malmaison. Analyse des ajustements réciproques dans une activité de co- enseignement : étude de cas dans le dispositif “ Plus de maîtres que de classes ”. Education et socialisation - Les cahiers du CERFEE, Presses Universitaires de la Méditerranée, 2018, 10.4000/edso.2894.hal-02618999
https://www.researchgate.net/publication/323576421
Philippe Tremblay et al. Université de Laval, Nathalie Trépanier et al.de Montréal, Elisabeth et al. du Québec, Claire Couture, d’Otawa et Anne Lessard de Sherbrooke, La collaboration entre enseignants et intervenants en milieu scolaire (2018)
Philippe Tremblay, Les types de micro-concertations et les gestes professionnels d’ajustement en contexte de co-enseignement intensif au Québec, Education et socialisation, n°66 2022, les cahiers du CERFEE
https://journals.openedition.org/edso/21649
Annexes
Annexe 1 : résultats sondage action de formation 1, disciplinaire, professeurs d’économie gestion et anglais intervenant en ETLV (03/02/2023)
Annexe 2 : résultats sondage action de formation 2, interdisciplinaire, professeurs de collège et lycée toutes disciplines . (09/02/2024)
Annexe 3 : modèle de grille support pour l’observation d’une séance
Source : Pier-Ann Boutin, Philippe Tremblay et al. La collaboration entre enseignants et intervenants en milieu scolaire, Centre de transfert pour la réussite éducative du Québec (CTREQ), 2018
Annexe 4 : Action de formation 2 : travail sur les exigences et tolérances des enseignants en contexte de co- enseignement
Annexe 5 : Postures enseignants
Figures :
Figure 1 : Co-intervention interne et externe
Figure 2 : Distinction co- intervention et co- enseignement
Source adaptée : inspiré de Rachel Harent. Le co-enseignement en pratique (2023). Edition Retz.
Figure 3 : Processus du co-enseignement
Source adaptée : Philippe Tremblay, Marie Toulec-Théry (2021)
https://ressources-enseignants.ddec85.org/2021/02/15/le-co-enseignement-pistes-pour-se-lancer/
Figure 4 : Niveaux d’interdépendance selon le continuum proposé par Little(1990)
Figure 5 : configurations possibles de l’espace de travail
Figure 6 : Déroulement possible d’une séance de co-intervention : mixer les configurations
Figure 7 : Répartition des approches de co-enseignement en fonction de l’interaction entre les agents impliqués
Figure 8 : Etapes du changement :La courbe d’engagement de Kübler Ross
Figure 9 : Modélisation de la posture d’étayage des enseignants (Saillot,2015)
[1]Ressources en ETLV au cycle terminal de la voie technologique mis à jour octobre 2023Note de service du 28-7-2021 parue au B.O. n°30 du 29 juillet 2021.https://www.education.gouv.fr/bo/21/Hebdo30/MENE2121270N.htm
[2]Référentiel du BTS SAM page 87. JO du 06 mars 2018
[3] Référentiel du formateur académique BO n°30 du 23 juillet 2015
[4]Dispositif Plus de maîtres que de classes » circulaire du 18/12/2012. Source : www.education.gouv.fr
[5]Loi pour « une école de la confiance »du 28/07/2019. Programme pour le cycle des approfondissements cycles 3 et 4 BO du 30 juillet 2020. Enseignements au collège organisation des enseignements modification arrêté du 16 juin 2017 -JO DU 18 JUIN 2017 ; Vade-mecum : mettre en œuvre la co-intervention dans la voie professionnelle Source : education.gouv.fr
[6]Effets du co-enseignement sur le développement de l’identité professionnelle des enseignants du secondaire Nancy Granger et Philippe Tremblay N65 2022 cahiers du CERFEE https://doi.org/10.4000/edso.20603
[7]Continuum de Little, de l’isolement à la collaboration,1990) cité par Claire Beaumont et al. CTREQ, la collaboration entre enseignants et intervenants en milieu scolaire p.8)
[8]tableau de l’indépendance à l’interdépendance (niveau d’interdépendance continuum proposé par Little en 1990) cité par Claire Beaumont p9)
[9]Myriam Janin et David Couvert. Le co-enseignement : bénéfices, limites et importance de la formation. Un article de la revue Éducation et francophonie Volume 48, numéro 2, automne 2020, p. 200–219 Regards croisés sur le co- enseignement en francophonie
[10]Co-enseignement: exemples en vidéo | Site d'Anglais de l'Académie de Grenoble
Page internet
[11]Texte de référence : Note de service du 28-7-2021 parue au B.O. n°30.https://pedagogie.ac-orleans-tours.fr/interlangues/contenus_et_pratiques_denseignement/lycee_general_et_technologique/etlv/
[12]Philippe Tremblay et al. Université de Laval, Nathalie Trépanier et al.de Montréal, Elisabeth et al. du Québec, Claire Couture, d’Otawa et Anne Lessard de Sherbrooke, La collaboration entre enseignants et intervenants en milieu scolaire p.36 (2018)
[13]Claire Beaumont Ph.D., José Lavoie, Caroline Couture, Ph.D. p4 première partie les pratiques collaboratives en milieu scolaire : état des connaissances, document produit par le CRIRES, Université Laval, Québec).
[14]Les situations de co-intervention, Marie Toullec-Théry : http://formations.inrp.fr/2015-01-07-m-toullec-thery.mp3
[15]Rachel Harent le co-enseignement en pratique p.153 Guadalupe Suarez-Dias ; répartition des approches de co-enseignement en fonction de l’interaction entre les agents impliqués
[16]Vademecum de la co-intervention en lycée professionnel,2019
[17]Philippe Ceschin revue 150 septembre 2007 diversité ville école intégration p 125 www.ac-creteil.fr/zeprep/contrats/montreuil-tillemont.pdf
[18]étude sur le dispositif PMQC caractérisation des ajustements réciproques des enseignants pour comprendre le co-enseignement ils supposent leur centralité dans l’activité de co-enseignement EricSaillot et Séverine Malmaison https://doi.org/10400/edso23275
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